Carte de la pollution lumineuse en France métropolitaine
Image choc pour marquer les esprits et faire le buzz sur les réseaux sociaux, sans aucun doute ! Voici la nouvelle carte de pollution lumineuse en France métropolitaine. Nous vous proposons quelques zooms sur différentes régions françaises et l’explication de la palette de couleur utilisée.
Flashback. 5 novembre dernier, le bilan annuel de l’Observatoire national de la biodiversité – ONB – est paru avec cette carte de France by night. Ce réseau de contributeurs est copiloté par :
- l’Office français de la biodiversité (OFB),
- le Service des données et études statistiques (SDES) du ministère de la Transition écologique.
Carte de pollution lumineuse en France métropolitaine
Le rapport décrit que « la pollution lumineuse, induite par les éclairages artificiels, perturbe le cycle biologique des espèces animales – comme pour certaines chauves-souris – et constitue une barrière parfois infranchissable, mettant à mal les continuités écologiques. »
85 % du territoire métropolitain est exposé à de forts niveaux de pollution lumineuse
Échelle de la carte de la pollution lumineuse
Le verso de cette publication présente une carte de la pollution lumineuse en France métropolitaine. Ce poster se base sur le nouvel indicateur de suivi de la pollution lumineuse de l’ONB :
- Luminance zénithale (mag/arcsec²) en cœur de nuit par temps clair et sans lune.
D’après la société DarkSkyLab, il s’agit d’un niveau de qualité de ciel. L’unité est la magnitude par seconde d’arc au carré, mag/arcsec².
Visibilité de la Voie lactée | Couleur sur la carte | Échelle de luminosité | Pollution lumineuse | Évaluation |
Invisible | Très brillant | 19,5 à 21 | Mauvais | |
Presque invisible | Brillant | |||
À peine visible | Fortement lumineux | |||
Visible au zénith | Lumineux | |||
Affaiblie à l’horizon | Peu lumineux | 21 à 21,5 | Moyen | |
Quelques détails | Assez sombre | |||
Nombreux détails | Sombre | 21,5 à 21,7 | Bon | |
Très détaillée | Très sombre |
Couleurs graphiques face aux fausses couleurs
Bien souvent auparavant, la cartographie Anpcen de la qualité de la nuit était en fausses couleurs. Comme les fausses couleurs des calculs d’éclairage Dialux et Relux, elles rendaient la lecture très difficile pour le non-spécialiste.
Ainsi, la représentation graphique est simplifiée à l’extrême pour capter l’attention et être accessible.
Avertissement et note de lecture
Une note dans le rapport précise bien que « cette représentation ne donne à voir qu’une partie du problème » des sources lumineuses.
Et de poursuivre « les données utilisées ne rendent compte que de la fraction de la pollution lumineuse qui est renvoyée vers le ciel, en cœur de nuit et par temps dégagé ».
De plus, il document ajoute : « par temps couvert, la lumière artificielle est réfléchie par les nuages, amplifiant le phénomène« .
Sans plus de détail, le rapport sur la biodiversité précise aussi que « la grande majorité des espèces nocturnes ainsi que de nombreuses espèces diurnes sont très actives en début et/ou en fin de nuit. Elles pourraient être confrontées à des niveaux de pollution lumineuse plus élevés que ceux présentés ici. Ils doivent être considérés comme une estimation basse du phénomène« .
Nulle part les origines de la pollution lumineuse, éclairage public et éclairage privé, ne sont citées, voir analysées en détail. Dommage. Mais l’Observatoire national de la biodiversité a-t-il cette compétence ? Peut-il être juge et partie ?
Conséquences de la pollution lumineuse sur la biodiversité
En bas de la carte, quelques explications sont données sur les conséquences de la pollution lumineuse sur la biodiversité.
« La pollution lumineuse agit comme une barrière infranchissable pour d’autres espèces qui fuient la lumière.
- Elles doivent donc accomplir leurs cycles de vie dans des habitats plus petits et morcelés.
La pollution lumineuse entraîne ainsi une fragmentation des milieux naturels.
- L’éclairage artificiel nocturne participe à l’artificialisation des territoires et génère une pollution lumineuse. »
- Avec diverses conséquences, comme le dérèglement de leurs rythmes biologiques et la modification de leurs comportements. »
Observatoire national de la biodiversité, bilan
Sans concession, le bilan annuel de l’Observatoire national de la biodiversité, décrit un tableau très sombre du domaine.
« Les scientifiques constatent, partout dans le monde, le rythme sans précédent du déclin de la biodiversité, au point que l’on parle de sixième extinction de masse.
En cause, les pressions que les activités humaines font peser sur la nature et dont la tendance est toujours à l’augmentation en dépit des engagements internationaux et des stratégies nationales ».
« Pourtant, la biodiversité est éminemment précieuse et notre survie en dépend, comme celle de tant d’espèces.
Face à l’effondrement des populations animales comme végétales et à la dégradation des écosystèmes, la société prend peu à peu conscience de l’importance de la biodiversité et une part croissante de la population s’engage et agit pour sa préservation ».
La biodiversité est en crise car, c’est le tissu vivant de notre planète, la Terre.
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Enquête « les Français et la nature »
Début 2020, une enquête « les Français et la nature » a été conduite par Ipsos et le Service statistique du ministère en charge de l’environnement (SDES). Un échantillon représentatif de 4553 personnes y a répondu. Les données collectées permettent de saisir la place qu’occupe la nature dans la vie quotidienne des Français.
Une présentation interactive de l’ensemble des résultats de l’enquête « Les Français et la nature » est disponible sur le site Internet du SDES. En voici un bref aperçu dans cette infographie en chiffres.
Approfondir le sujet
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Livres
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Bonjour,
Petite réaction à l’article sur la nouvelle carte de pollution lumineuse produite par l’AFB. Quand j’ai vu « Analyse », je me suis dis super, je vais lire une une analyse sur une carte qui peut interroger par certains points de vue. J’ai été un peu déçue car c’est surtout un résumé qui est donné.
En fait, parmi les questions que je me pose, et si quelqu’un a une réponse, je suis intéressée :
– quoi de neuf par rapport à la carte en ligne issue de la publication de Falchi de 2015, dont la modélisation est reprise par Jurij Stare https://www.lightpollutionmap.info/#zoom=4.78&lat=46.3779&lon=9.4250&layers=B0FFFFFFFTFFFFFFFFFF),
– comment est pris en compte le passage aux LED. Une publication récente montre que les images satellites sous-estiment beaucoup la radiance à cause des angles morts dans la bande spectrale < 500nm : l'évolution des émissions lumineuses de 49% en 25 ans (1992-2017) serait en fait bien plus importante,
– comment est pris en compte le relief qui peut limiter la diffusion de l'éclairage en zone de montagne. Il me semble que c'était un des points faibles de la modélisation de Falchi et que, de fait, la pollution lumineuse est sur-estimée en zone de montagne (Parc des Écrins par exemple).
Mes questions n'enlèvent rien à la préoccupation que nous devrions tous avoir sur la pollution lumineuse et à l'intérêt d'une carte pour faire le buzz, mais personnellement je préfère toujours savoir comment est faite une carte.
Cordialement
Hélène Foglar
@Hélène. Merci pour vos retours. En effet, l’article n’a pas un but scientifique, mais simplement d’information. Sans doute d’autres lecteurs pourront vous répondre en commentaires ci-dessous sur la question de la mesure.
Par contre, en termes de cartographie et de vision sociétale d’un pays, je trouve que l’analyse graphique des modes de représentation et des couleurs utilisées passionnante. C’est ce qui m’a intéressé de comprendre dans cette vision. Pourquoi a cette carte a changé de teinte et de rendu visuel brusquement par rapport à celle de Falchi de 2015 ? Quels en sont les raisons ?
Sensibiliser sur les problèmes de nuisances lumineuses, c’est évidemment louable et bienvenu.
En revanche, je ne suis pas convaincu par ce genre de spectacularisation de résultats scientifiques. Cela dessert le propos.
Tel un photographe qui peut volontairement sous-exposer ou surexposer ses photos, le choix de l’échelle en fausses couleurs peut faire dire ce que l’on veut à une cartographie.
Ici, qui a choisi les seuils discriminant le « bon », le « moyen » et le « mauvais » ? Quelles espèces d’animaux sont concernées ?
On ne sait rien non plus de la méthode de mesure : collecte de mesures depuis le sol ? Analyse d’images satellitaires ? Quelle résolution spatiale ? Quantifier correctement la luminance sur l’échelle d’un territoire est assurément complexe et constitue des sujets de recherche en cours pour des laboratoires de métrologie. Pour cette carte, des ordres de grandeur de luminance peuvent sans doute suffire mais il faudrait le préciser.
Et quitte à faire une carte à destination du grand public, il aurait été plus judicieux de choisir une échelle croissante avec la luminosité et non inverse.
Enfin, il faudrait préciser sur quel domaine spectral sont effectuées les mesures, et là encore pour quelles espèces ce domaine spectral est pertinent.
Voici une autre carte de pollution lumineuse en libre accès : https://www.cartesfrance.fr/geographie/cartes-population/carte-densite-population-2009.html
L’échelle est plus finement quantifiée et la résolution spatiale est bien meilleure.
Certes l’échelle est moins directe en nbr d’habs/km2 mais la corrélation avec les nuisances lumineuses est tellement forte que la mesure n’en est probablement pas moins fiable que sur la carte présentée dans l’article.
Et ô surprise, pour observer un ciel étoilé, il faut mieux être dans la Creuse que dans une grande métropole. Je ne suis pas sûr que la carte affichée par l’observatoire de la biodiversité apporte une plus-value par rapport à une carte de densité de population.
Alerter sur le problème majeur des nuisances lumineuses, c’est bien mais il aurait été plus judicieux de le faire autrement qu’en affichant cette carte qui masque la complexité d’évaluer ces nuisances lumineuses.
Merci pour les compléments apportés. Je vois que je ne suis pas seule à me poser des question 🙂
Notamment, ce qui peut me gêner dans la carte produite, c’est qu’il y a a des secteurs (les plus bleus) où les communes pourraient se dire que tout va bien, ou presque. Ce sont des secteurs ruraux peu urbanisés. Alors que, de mon point de vue d’écologue, c’est justement là qu’il y a le plus d’enjeux et que l’éclairage doit être regardé à une échelle très locale ; échelle qui n’est pas celle de la carte de France sur un A4 ni même un A0 !
Il y a également des secteurs jaunes (tout le PNR de Chartreuse par exemple) où les communes rurales pourraient se dire que de toute façon c’est fichu car elles baignent dans une pollution lumineuse qui dépasse leur commune et leur pouvoir d’action. Encore une fois c’est une question d’échelle et là aussi des actions sont pertinentes.
C’est toujours le problème de la simplification pour faire passer des messages. Je ne sais plus qui disait « ce qui est simple est faux et ce qui est compliqué n’intéresse personne »…
Et je viens de voir aussi une partie des réponses à mes question sur ce lien (https://naturefrance.fr/indicateurs/proportion-du-territoire-metropolitain-fortement-impacte-par-la-pollution-lumineuse-en)
Il s’agit donc bien de l’explotation des images VIIRS avec une aproche très astro (radiance du ciel) qui ne tiens pas compte de l’irradiance au sol qui intéresse le vivant.
Bonjour,
Adjointe au maire d’une petite commune je voulais savoir s’il y avait un label « ciel pur » ou une quelconque certification qui nous permettrait de prendre les bonnes décisions en termes d’éclairage public.
Merci
Madame Peter,
Plusieurs labels existent à ce jour, un label décerné par l’Association Nationale de la Protection du Ciel et de l’Environnement Nocturnes (ANPCEN), intitulé « Villes et villages étoilés », et une gamme de labellisations internationales émises par l’International Dark Sky Association avec, notamment, un indicateur « Réserve Internationale de Ciel Etoilé (RICE) » détenu en France par, a minima, le Parc National des Cévennes, le Pic du Midi de Bigorre, les Alpes Azur Mercantour et le Parc naturel Régional Millevaches en Limousin.
Liens :
ANPCEN : https://www.anpcen.fr/
RICE :