La Fête des Lumières de Lyon peut-elle se renouveler ?
Depuis 1999, la Fête des Lumières de Lyon est un événement national. Au fil des éditions, son renouvellement artistique pose question. Elle semble s’installer dans la complaisance et non dans l’innovation et la création artistique. Comment améliorer la qualité de l’événement phare de la ville de Lyon ? Qu’est ce qui n’a pas marché l’an dernier pour faire mieux en 2018 ? Voici les flops 2017 !
Films d’animation à gogo
Pas moins de trois spectacles clefs de la Fête des Lumières 2017 dans le centre-ville sont réalisés en film d’animation :
- Odysseus, de Flshka design, sur la façade de la gare Saint-Paul.
- Insert Coin, de Mr.Beam, sur la grande Poste et le clocher de la Charité,
- Enoha fait son cinéma, de Nathanaëlle Picot, sur la place des Terreaux,
Ils prennent réellement le spectateur par la main pour raconter leurs histoires… Un ou deux personnages/enfants en animation font le travail de liaison dans l’environnement imaginaire projeté. En bref, ils utilisent la même structure narrative et des enfantillages pour séduire le plus grand nombre.
- La Fête des lumières est-elle à bout de souffle ?
- L’innovation lumière passe-t’elle par le cinéma ?
- Le film d’animation est-il en manque d’inspiration ?
Concomitance mal gérée
Sur la colline de Fourvière, c’est la proximité de deux installations qui dérange :
- Globoscope, du Collectif Coin, sur la pente de la place des Minimes,
- Guignol sur la Colline, de OCUBO projeté sur la façade du Collège Jean Moulin.
Le volume sonore de la première est beaucoup trop important. Il absorbe réellement la seconde. De plus, Guignol sur la Colline étant visible en arrière-plan de Globoscope, l’effet de surprise des projections d’images s’en trouve amoindri.
Dommage pour la création d’OCUBO qui était vraiment originale autour de Guignol ayant fait intervenir les élèves du collège Jean Moulin avec un tournage sur fond vert. Encore une technique venue de l’écran de télévision qui passe à la ville…
Finitions, peut mieux faire
Ailleurs, la qualité de l’installation donne l’impression que le budget a manqué pour les finitions. Deux exemples parmi d’autres.
https://x.com/Jeff_R_P/status/938688356640264193
Golden Hours, de Jacques Rival, place des Jacobins. L’horloge géante sous cloche de Jacques Rival fonctionne mieux de jour que de nuit, avec les multiples réflexions de l’environnement urbain. Éclairée, elle est un peu vide pour faire vibrer le public et emplir l’espace public de magie.
Platonic, de Julien Menzel place Saint-Nizier. La structure qui soutient la sculpture est trop visible. A proximité, les barrettes LED de 5 mm semblent un peu datées par rapport à l’abstraction de la forme géométrique de l’installation.
Erreur de casting
L’installation de Rugby Pass Path de Rémi Brun et son célèbre rugbyman est malheureusement implantée à l’angle de deux rues. Manque de recul pour le public et environnement urbain trop lumineux ne mettent pas en valeur l’installation filmée en motion picture comme les footballeurs en 2017.
La colline de Fourvière tente de refaire le son et lumière avec Time for light des Orpailleurs de Lumière. L’échelle du lieu est toujours aussi difficile à appréhender d’année en année par les artistes qui s’y cassent les dents. Exemple encore une fois en 2017 :
- Ne vaudrait-il pas mieux stopper toute création sur cet ensemble urbain hors échelle et de budget ?
- Une création pyrotechnique d’une compagnie étrangère ne pourrais pas t’elle être envisagée ici ?
Incendie au théâtre antique
Le 9 décembre, le feu s’est invité inopinément à la Fête des Lumières 2017. Un incendie des bougies posées sur des cartons pour la Fresque des lumignons a eu lieu dans le théâtre antique de Fourvière. Plus de peur que de mal et aucun blessé.
https://x.com/prefetrhone/status/939611203831320576
Telle la torchère de l’usine de Feszin le 8 décembre 2016, elle rappelle s’il en est l’origine de la lumière à travers le feu.
Label Fête des Lumières à l’export
Depuis 2016, l’équipe de la Fête des Lumières a mise en place un programme « Résonance ». En bref, elle consiste à commercialiser le label Fête des Lumières de Lyon hors de la métropole. Créés originellement pour Lyon, des œuvres et artistes amis sont exportés, de manière groupée par cinq ou six, à l’étranger. Voici les exemples de programmation artistique et gestion d’événements réalisés l’an dernier par la ville de Lyon :
- Fête des Lumières, place Bolivar, pour la ville de Bogota, pour l’année France-Colombie. Du 16 au 23 décembre 2016.
- Illuminart, à Montréal, du 23 février au 11 mars 2017. 6 oeuvres présentées à Lyon.
- Les Nocturnes du Parc des Oiseaux, parcours nocturne, du 13 juillet au 3 septembre 2017.
- Fiesta de la Luz, 2ème édition, pour la ville de Quito, Equateur, du 9 au 13 août 2017.
- Foire du livre de Francfort, mise en lumière de la façade de l’Hôtel de ville Römer. 9 au 15 octobre 2017.
- Lumières Hong Kong à l’occasion du 20ème anniversaire de la fin de la souveraineté britannique, du 23 au 25 novembre 2017.
- Lumière Saint-Gervais Mont-Blanc, 2ème édition, pour la ville de Saint-Gervais Mont-Blanc, du 28 décembre 2017 au 4 janvier 2018.
Ce travail supplémentaire peut-être vu comme un export du savoir-faire lyonnais à l’international de la création lumière éphémère française. Pour autant, cette dispersion des activités de la collectivité locale à l’étranger permet-il au service des événements de la ville de Lyon d’avoir plus de moyens humains, techniques et budgétaires pour organiser la vraie Fête des Lumières à Lyon 200% plus dynamique, créative et innovante ?
Si les équipes de la Fête des Lumières n’ont pas été doublées par le maire de Lyon, le temps à préparer l’événement lumière à Lyon autour du 8 décembre est réduit considérablement par toutes ces activités supplémentaires.
Pour se renouveler, ne faudrait-il pas :
- prendre plus de risque artistique ?
- choisir des lieux non investis sur la commune ?
- inviter des pointures étrangères de la lumière ?
- chercher des jeunes créatifs originaux ?
Je pose la question :
- comment la Fête des Lumières pourrait-elle se renouveler au niveau artistique ?
Équipe du projet
Lieu
- Lypn, France
Livres
Bright 2, Architectural Illumination and Light Installations
Découvrez un savant mélange de projets lumière inspirants à travers le monde. Bright 2 publié par Frame Publishers sur l'éclairage architectural. |
Lexique de l’éclairage professionnel, de Sophie Caclin
La traduction facile français-anglais en architecture, urbanisme, lumière, éclairage et communication. Découvrez le Lexique de l’éclairage professionnel. |
Concevoir la lumière comme un levier de développement touristique
Croiser les regards de concepteurs lumière, d’élus, de dirigeants municipaux et du tourisme. Des expériences et témoignages de villes à travers le monde. |
bonjour,
Pour apporter quelques précisions à votre article … Il est difficile pour les jeunes artistes créatifs d’entrer dans la boucle de la fête des Lumières, notamment sur les installations et sites les plus importants.
En effet, le fait de passer par un appel d’offre via la plateforme de marché de la ville implique des capacités administratives et financières que de jeunes structures n’ont pas pour postuler. Pourquoi ne pas passer par un appel à projet purement « artistique » comme le font la plupart des festivals internationaux ?
De même, un « mapping contest » source de richesse de proposition et de rayonnement international manque à cette belle fête des Lumières… !
Bonsoir,
J’ai trouvé intéressant les questions de votre article car je partage l’idée d’une fête des Lumières qui devient de plus en plus prévisible même si on voit tous les ans quelques belles installations, ou des interventions innovantes. Ce doit effectivement être difficile de renouveler les installations chaque année, mais depuis deux ans la colline de Fournière laisse un goût de déjà-vu, et les projections vidéos cette année n’étaient quand même pas au même niveau que ce que nous avions pu voir dans le passé.
Quelles sont les raisons de ce manque d’audace et de créativité artistique ? Est-ce dû aux politiques qui ne veulent prendre aucun risque et préfèrent choisir du consensuel, même très moyen ? Aux marchés publics qui doivent quand même réduire le nombre de propositions et donc limiter le choix (quid d’une vraie direction artistique dans ce cas là) ? Au fait que l’on voit souvent les mêmes artistes revenir… et peut-être s’user au niveau créatif ? A l’équipe de direction si elle se disperse sur plusieurs terrains à la fois ?
Quand on compare la Fête des Lumières avec d’autres grands événements lyonnais, les biennales de la Danse ou d’Art Contemporain, le festival de Fourvière, on se dit qu’il y a quand même une belle marge de progression créative…
La fête de lumière est devenu depuis de nombreuses années la fête de l’image.
Les installations comme celle d’EZ3kiel l’an dernier, qui allie performance et poésie sont rares. A part Montréal, les autres fêtes des lumières sont des fêtes de mapping.