Prix Nobel 2018 : inventions révolutionnaires, physique et Lasers
Le prix Nobel de physique obtenu par le français Gérard Mourou aura sans doute moins de retentissement qu’une victoire en coupe du monde de football. Ce prix autour de la photonique du Laser constitue néanmoins une source de fierté nationale tout aussi légitime. Et de la même manière que les meilleurs joueurs de football pratiquent dans des clubs à l’étranger, la recherche de haut niveau s’opère dans un contexte international.
En effet, les travaux récompensés ont ainsi été réalisés à l’université de Rochester aux Etats-Unis avec la canadienne Donna Strickland, co-récipiendaire du prix Nobel. Quant à ses clubs formateurs, Gérard Mourou a bénéficié de la dualité de l’enseignement supérieur, spécifique à la France. Il a fait ses études à l’Université de Grenoble puis dans une grande école, en l’occurrence Polytechnique.
Laser, lumière amplifiée par émission stimulée du rayonnement
Ces chercheurs ont eu besoin d’une source de lumière aux propriétés particulières que ne leur offrent, ni la lumière du soleil, ni celle des lampes d’éclairage : le Laser. Si le nom est à présent dans le langage courant, il s’agit de l’acronyme de light amplification by stimulated emission of radiation (lumière amplifiée par émission stimulée du rayonnement). Un atome à l’état excité, peut émettre spontanément un photon en revenant à son état fondamental de plus faible énergie.
L’émission peut aussi être stimulée lorsque l’atome excité absorbe un photon de même énergie que le photon émis. Ce principe d’émission stimulé a été décrit dès 1916 par Albert Einstein. Il a fallu attendre 1953 pour la réalisation du premier Laser (d’abord dans la gamme des micro-ondes) par l’américain Charles Hard Townes, lui aussi prix Nobel de physique en 1964. Une des difficultés est que l’émission stimulée nécessite de piéger les atomes dans un état excité. Une solution de « pompage optique » avait été proposée et validée par Alfred Kastler en 1950.
Très bref, très intense
Il existe aujourd’hui de très nombreux types de lasers dédiés à des applications diverses. Parmi les développements les plus spectaculaires, la technique proposée par Gérard Mourou et Donna Strickland (CPA – Amplification par dérive de fréquence) constitue dans les années 1980 une véritable rupture technologique dans la quête du laser le plus puissant.
CPA, un principe élégant
Pour obtenir un Laser très puissant, il faut partir d’une impulsion très courte et l’amplifier. Mais dans les années 1980, une trop forte puissance endommageait les instruments optiques. La méthode proposée par Gérard Mourou et Donna Strickland est élégante par sa simplicité. Pour passer l’étape d’amplification sans endommagement, les impulsions laser très courtes sont étirées et par conséquence baissent en valeur maximale. Ce signal est amplifié puis subit l’opération inverse de compression. Le schéma suivant résume la technique CPA pour Chirped Pulse Amplification que l’on pourrait traduire par : amplification d’impulsion par dérive de fréquence.
De nombreuses applications
Mis en avant par le site du prix Nobel, le traitement de la myopie par Laser femtoseconde a permis de soigner des millions de personnes. Cependant, c’est la durée de l’impulsion laser qui joue ici un rôle essentiel. A l’échelle picoseconde, les effets thermiques sont beaucoup plus faibles que pour un laser nanoseconde. Les zones périphériques à celle traitée sont moins endommagées.
Les utilisations des lasers plus spécifiques à très fortes puissances sont davantage tournées vers la recherche fondamentale en astrophysique, sur la simulation d’explosions nucléaires ou sur l’accélération de particules. Gérard Mourou évoque aussi la transformation des déchets nucléaires ou l’élimination des débris de l’espace.
Alors qu’un prix Nobel couronne souvent une carrière, le français l’espère comme un facilitateur à ses ambitieux projets. Une leçon pour tous les champions afin de rester motivés après la victoire.
Evolution de la puissance surfacique des Lasers
Des installations atteignent déjà le pétawatt (1015 W) comme le laser PETAL du CEA près de Bordeaux, inauguré en 2015. Il est sans doute utile de préciser que ces puissances colossales ne sont produites que sur des impulsions très courtes de l’ordre de la nano (10-9 s) voire de la picoseconde (10-12 s).
Gérard Mourou est encore aujourd’hui très engagé dans de nombreux projets pour aller au-delà du pétawatt. Infatigable promoteur des lasers de très fortes puissances, il a parfois utilisé des méthodes peu académiques… comme en témoigne cet article du Monde « Quand le Nobel Gérard Mourou se mettait en scène dans un clip musical potache”.
Prix Nobel de physique, une spécialité française
Avant lui, d’autres français ont obtenu le prix Nobel de physique pour leurs travaux également dans le domaine de l’optique :
- 2012 : Serge Haroche,
- 1997 : Claude Cohen-Tannoudji,
- 1966 : Alfred Kastler.
Formidable filiation scientifique, tous les trois ont mené leurs recherches dans le même laboratoire de l’Ecole Normale Supérieure de Paris.
La lumière extrême
Retrouver la conférence de Gérard Mourou sur la lumière extrême, en 2015, pour Année de la Lumière en France.
Lauréats du prix Nobel de physique 2018
Arthur Ashkin
- Affiliation au moment de l’attribution : Bell Laboratories, Holmdel, New Jersey, États-Unis
- Motivation : « pour les pinces optiques et leur application aux systèmes biologiques ».
- Part du prix : 1/2
Gérard Mourou
- Affiliation au moment de la remise des prix :
- École Polytechnique, Palaiseau, France,
- Université du Michigan, Ann Arbor, MI, États-Unis.
- Motivation du prix : « pour leur méthode de génération d’impulsions optiques de haute intensité et ultra-courtes. »
- Part du prix : 1/4
Donna Strickland
- Affiliation au moment de l’attribution: Université de Waterloo, Waterloo, Canada
- Motivation du prix: « pour leur méthode de génération d’impulsions optiques de haute intensité et ultra-courtes. »
- Part du prix: 1/4
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Équipe du projet
Évènement
- François Morellet, l’esprit de suite à Avignon
- EXPOSITION - Jusqu'au 28 octobre, aller visiter la rétrospective de François Morellet, l'esprit de suite, au musée Angladon, collection Jacques Doucet à Avignon.
- Date : du vendredi 6 juillet 2018 au dimanche 28 octobre 2018
- Lieu :
- Musée Angladon – Collection Jacques Doucet
- Avignon, France