Horacio Garcia Rossi : Que la lumière soit à Paris
Horacio Garcia Rossi (1929-2012) apprivoise la lumière dans les années 1960, participe à l’aventure du GRAv (avec Julio Le Parc, François Morellet, Francisco Sobrino, Joël Stein et Yvaral), s’intéresse un temps aux possibilités plastiques du plexiglas dans les années 1970, puis se consacre en peinture à son domaine
de prédilection : la couleur lumière. La ligne blanche qui parcourt ses toiles lui permettait de décliner les couleurs et de les rehausser pour donner l’illusion qu’une lumière éclairait chaque toile de l’intérieur.
À l’occasion de ce 10e printemps sans lui, sa fille Barbara Garcia Lemaitre et sa galeriste Lélia Mordoch ont souhaité célébrer le retour de la lumière en assurant le commissariat d’une exposition rassemblant un ensemble significatif de son oeuvre, issu de leur collection personnelle. Boîtes à lumière des années 1960 et sphères cinétiques des années 1970 accompagnent des gouaches des années 1960 et des peintures des années 1990 à 2010 : couleur lumière, couleur lumière cinéma, couleur lumière enragée (1999-2002), couleur lumière en cage (2003-2005), khaos programme, couleur noir lumière, couleur lumière transparence (retour)…
Horacio Garcia Rossi préférait les expositions au printemps. Lélia Mordoch se souvient de leur première collaboration en mai 1992 : « un samedi après-midi de cette première exposition, nous avons eu une panne de courant… et la surprise de constater que les tableaux vivaient de leur lumière propre. »
Du 17 mars au 20 mai, la galerie Lélia Mordoch accueille Horacio Garcia Rossi : Que la lumière soit. A Paris, 50 rue Mazarine dans le 6ème arrondissement, l’exposition est ouverte du mardi au samedi, de 11h à 19h.
Horacio Garcia Rossi : 1929-2012
Né le 24 juillet 1929 à Buenos Aires, Horacio Garcia Rossi fait ses études dans la capitale argentine, notamment à l’École Nationale des Beaux-Arts de la ville. II rencontre à cette époque Hugo Demarco, Julio Le Parc et Francisco Sobrino, eux aussi Argentins. Ensemble, ils participent aux mouvements étudiants
contestataires de 1955. L’artiste arrive en France en 1959 et s’installe à Paris, alors aux yeux de tous la capitale internationale de l’art.
Horacio Garcia Rossi, Julio Le Parc, François Morellet, Francisco Sobrino, Joël Stein et Jean-Pierre Yvaral fondent le GRAv (Groupe de recherche d’art visuel, 1960-1968) qui sera exposé dès 1961 à la galerie Denise René. En 1963, le GRAv présente à la IIIe Biennale de Paris sa première oeuvre collective, un Labyrinthe composé d’un enchaînement de plusieurs cellules tout au long desquelles le visiteur est soumis à divers effets visuels et physiques. En 1966, le GRAv descend dans la rue avec ses oeuvres pour « entrer en contact avec un public non prévenu » et « dépasser les rapports traditionnels de l’oeuvre d’art et du public ».
Boîtes à lumière de Horacio Garcia Rossi
Dès 1962, Horacio Garcia Rossi entreprend ses recherches sur l’instabilité avec les boîtes à lumière. Agissant sur les mécanismes de l’oeil, ces oeuvres changent avec le regard du spectateur et son angle de vision. Elles révèlent le caractère plastique de la lumière, alors perçue comme une sculpture en mouvement.
Dans les boîtes à lumière instable, les formes et les couleurs naissent et disparaissent sur un rythme changeant au gré du hasard, l’ensemble étant mu par un moteur caché à l’intérieur. Dans Relief à lumière instable (1965), la lumière est uniquement perçue par les extrémités de tiges de plexiglas, fichées dans la boîte, donnant à l’ensemble un aspect miroitant, sans cesse en mouvement.
« J’aspire, avec un minimum de choix et une grande économie de moyens, à concevoir et réaliser des expériences aux multiples possibilités. »
Horacio Garcia Rossi, 1962
Avec le GRAv ou individuellement, tous réalisent des oeuvres interactives. l’artiste crée une boîte avec vingt disques interchangeables : dix motifs et dix couleurs différentes que le public peut manipuler à son gré. Toujours à cette époque, il met aussi en mouvement des sculptures en plexiglas.
À la dissolution du GRAv en 1968, il poursuit ses recherches sur l’instabilité et la couleur, puis dans le domaine de la sémiotique. Dans les années 1970, Horacio Garcia Rossi met en place des procédés où couleurs et formes géométriques sont codées selon les lettres de l’alphabet.
Déjà amorcé dans l’oeuvre Mouvement (1964) – une oeuvre à lumière instable où le mot mouvement, répété dix fois, se projette et se superpose sur un écran lumineux –, ce processus d’alphabet ambigu est adapté aux noms et à l’oeuvre d’artistes dont il réalise des portraits de noms comme Mondrian, Malevitch, Arp ou Herbin. Il pousse même la personnalisation en créant un « questionnaire psycho-affectif » lui permettant d’établir des valeurs entre les formes et les couleurs pour la réalisation de portraits du nom de chacun.
Couleur lumière en peinture
À la fin des années 1970, Horacio Garcia Rossi centre définitivement son travail sur la couleur lumière. Retournant à la problématique de l’oeuvre en deux dimensions, il poursuit ses recherches à partir d’une ligne blanche, à laquelle il ajoute une couleur pure dans une ligne adjacente, puis la dégrade en la fonçant vers l’obscurité.
« Fondre la lumière et la couleur en une unité indissoluble. Dans ces recherches, la couleur ne se manifeste ni comme un élément décoratif en lui-même, ni comme une variété de couleurs mélangées, mais comme un groupement destiné à créer une nouvelle structure de visualisation : la couleur lumière. »
Horacio Garcia Rossi, 1978
Après une longue parenthèse italienne, Horacio rencontre Lélia Mordoch au début des années 1990. Elle lui consacrera plusieurs expositions personnelles dans sa galerie de Saint-Germain-des-Prés et lors de foires d’art contemporain comme Art Miami, FIA Caracas, MiArt Milan, Art Palm Beach, Art Paris…
En 1998, à l’occasion de l’exposition “GRAv, Stratégies de participation 1960-1968” au Magasin, centre national d’art contemporain de Grenoble qu’elle visite avec lui, Horacio lui présente les autres membres du groupe. Tous acceptent de confronter leurs travaux d’alors dans sa galerie, rue de Seine, dans une exposition collective : “Le GRAv après le GRAv” en 1999. S’ensuivent une longue amitié et de nombreuses expositions personnelles dans la galerie, rue Mazarine, ou à Art Paris, notamment avec François Morellet et Julio Le Parc.
En 2010, Lélia Mordoch édite une monographie, retrace le parcours de l’artiste de ses années à Buenos Aires, du GRAv aux couleurs lumières, avec des textes de Horacio Garcia Rossi, Julio Le Parc, Danielle et François Morellet, Francisco Sobrino, Joël Stein, María Paula Mac Loughlin, Françoise Armengaud, Frank Popper, Floriano De Santi, Leonardo Conti, Monica Bonollo, Giovanna Barbero et Lélia Mordoch.
En 2013, l’exposition Dynamo présente une réplique du Labyrinthe du GRAv (1963-2013) ainsi qu’une Boîte à lumière instable (1964) d’Horacio Garcia Rossi, au Grand Palais à Paris.
En 2023, du 17 mars au 20 mai, la galerie Lélia Mordoch accueille à Paris l’exposition Horacio Garcia Rossi : Que la lumière soit. Voici quelques œuvres à découvrir.
Galerie des œuvres de Horacio Garcia Rossi
Peinture en tête de l’article : Horacio GARCIA ROSSI, Couleur Lumière, 1996, gouache sur carton, 50 x 50 cm © Barbara Garcia Lemaitre
Lieu
- Galerie Lélia Mordoch
- Paris, France
Livres
Quand la lumière devient couleur, de Georges Roque
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