Agnès Jullian, de l’espace public à l’architecture
Qu’est-ce que la lumière pour toi ?
Agnès Jullian : la lumière, c’est la vie. Même si l’œil et la rétine s’habituent au noir, nous avons du mal à vivre totalement dans l’obscurité. Nous sommes tous admirateurs des ciels étoilés mais aussi de ciels très lumineux. Nous préférons tous un beau ciel bleu à la grisaille, parce que la lumière est capitale pour notre bien-être.
Quel sens donnes-tu à l’éclairage ?
Agnès Jullian : la lumière dans mon métier, c’est encore autre chose. Notre objectif est d’apporter le juste éclairement, au travers d’un mobilier pérenne, adapté aux usages, évolutif, dans un monde en perpétuel mouvement. Apporter lumière, confort, sécurité. Faire vivre les nuits, là où c’est nécessaire.
Un éclairage durable, avec du mobilier créé et fabriqué en France. Aujourd’hui tout le monde revendique le « made in France », or nous sommes très peu à produire réellement en France, car malheureusement les sites industriels français sont de moins en moins nombreux.
L’éclairage, c’est certes une fonction, mais ce sont aussi des objets. J’ai toujours dit que nous ne faisions ni des poteaux ni des gamelles ; j’insiste d’autant plus que Technilum est ensemblier : nous fabriquons des mâts, des candélabres, mais aussi des luminaires.
Aujourd’hui, ce qui est important, pour du mobilier d’éclairage, ce sont les réponses qu’il peut apporter en termes d’usages, car faire la lumière pour la lumière, ça n’est pas suffisant ! Notre leitmotiv est évidemment de proposer des luminaires qui éclairent bien, gradables et avec un bon confort visuel, mais aussi un mobilier qui s’intègre parfaitement dans l’environnement urbain.
Quelle a été ta première émotion en éclairage urbain ?
Agnès Jullian : du plus jeune âge à aujourd’hui, ce qui est toujours grisant c’est de découvrir des lampadaires fabriqués dans nos ateliers sur des réalisations prestigieuses. Très jeune, ce fût le cas sur la Croisette à Cannes et autour du Palais des Festivals, ou encore sur les 7 km de la Promenade des Anglais à Nice.
Comment l’espace public participe-t-il à la création de la ville ?
Agnès Jullian : je suis intimement persuadée que l’espace public est essentiel au vivre-ensemble. Les projets architecturaux associent souvent une composante paysagère et/ou urbanistique – Un bâtiment public (aussi beau soit-il) qui n’a pas de parvis, ça ne fonctionne plus dans l’espace public, car il ne participe pas à la création de la ville.
Je pense que le Covid a aussi accéléré la prise de conscience que nous vivons au sein de l’espace public ; que la vie sociale, l’alchimie entre les habitants s’y forge… Des espaces publics réussis sont assurément des vecteurs d’attractivité pour les villes.
Quelle politique avoir en urbanisme dans les communes ?
Agnès Jullian : aujourd’hui, quand l’espace public est abordé, comme l’a dit François Bayrou durant les Heureuses Coïncidences 2022, c’est souvent à l’échelle de l’hyper-centre, autour de la place principale avec son église, sa mairie et son école. C’est un peu dommage, car l’espace public est partout. Heureusement, ce centre névralgique est souvent l’amorce d’une réflexion plus globale.
Quelle doit être la place de l’espace public aujourd’hui ?
Agnès Jullian : je pense qu’il faut accorder une place prépondérante à l’espace public, au-delà de ce qui est parfois fait dans certaines villes. S’il n’est pas parfaitement maîtrisé, ça en fera un non-lieu, puis une zone en déshérence. À l’abandon, cela incitera à des pratiques dégradantes. Alors qu’un espace maîtrisé entraîne automatiquement le respect. Ainsi, l’espace public contribue à plus de bienveillance les uns envers les autres, s’il est correctement géré.
Propos recueillis à Sérignan par Vincent Laganier le 10 septembre 2022.
A suivre…
Technilum, fabricant de mobilier urbain d’éclairage
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