« Un moyen de magnifier l’architecture » Vincent Muracciole
En cette rentrée des classes, quoi de plus important que la lumière après les Jeux paralympiques de Paris ! À l’occasion de l’Année internationale de la lumière, Light ZOOM Lumière a réalisé une trentaine d’interviews pensées lumière. Réalisées par les contributeurs du portail LZL, nous reprenons cette aventure avec la rencontre de Vincent Muracciole. Lighting designer, photographe au sol et dans les airs, chez Design de Lux, il est aussi enseignant. Voici ses pensées lumière.
Qu’est-ce que la lumière pour toi ?
Vincent Muracciole : C’est un moyen de magnifier l’architecture.
Quelle a été ta première émotion de lumière ?
Vincent Muracciole : Une exposition de James Turrell à Paris. J’étais étudiant, cela fait longtemps. C’est la première fois que j’ai trouvé que ma vision était troublée, car elle nous empêchait de voir. C’était comme un dialogue énergétique !
Quel est ton sentiment de lumière préféré ?
Vincent Muracciole : La lumière japonaise qui passe à travers des murs de papier en fibres de mûrier. C’est de la lumière qui t’enveloppe vraiment.
Quel est le projet lumière le plus abouti ?
Vincent Muracciole : Récemment, la mise en lumière du Grand Rex par le Studio Vicarini, parce qu’il y a un côté très festif, qui magnifie l’architecture Art Déco du bâtiment tout en restant très sobre . C’est un très beau projet.
Quelle personnalité en éclairage est la plus inspirante pour toi ?
Vincent Muracciole : J’aime beaucoup le travail de Sara Castagné et l’équipe de Concepto, parce qu’elle a apporté de la poésie dans la lumière de ses projets, à l’échelle urbaine, ce qui est loin d’être évident.
Quel est ton objet lumineux préféré ?
Vincent Muracciole : Lumio, c’est un livre dont les pages sont « luminescentes ». C’est comme un tableau lumineux quand tu tournes les pages. Je l’avais acheté sur Kickstarter avant qu’il ne soit commercialisé, parce que cet objet m’avait plu : c’est magique, la lumière éclaire le lecteur. J’ai d’ailleurs fait des portraits avec ce livre. J’adore cette ligne d’objets lumineux !
Quelle est la photographie la plus mémorable selon toi ?
Vincent Muracciole : J’aime beaucoup le travail de Todd Hido, un photographe américain qui capte la lumière. Il se promène la nuit et photographie des ambiances lumineuses. Ça donne des atmosphères cinématographiques dans les banlieues des grandes villes américaines. C’est quelque chose de très inspirant, car il est possible, juste avec la lumière, de créer des émotions et des sensations. Il utilise le minimalisme et les couleurs. Parfois, on distingue la lueur d’une télévision, une présence humaine invisible et la lumière sort à travers la fenêtre.
Comment utilises-tu l’éclairage en tant que concepteur lumière ?
Vincent Muracciole : L’éclairage crée des ambiances permettant de magnifier l’architecture, de donner à voir les volumes et de révéler des matières. C’est vraiment pour moi la 4e dimension de l’architecture. D’abord, je me base toujours sur ce qui existe. Ensuite, j’envisage comment la lumière peut accompagner la vie du bâtiment et celle des usagers à l’intérieur. Il y a toujours ce regard de designer. Que va-t-il se passer ? Qu’est-ce que les gens vont faire ici ? En fonction des réponses, je vais proposer un éclairage basé sur les usages des utilisateurs.
Qu’est-ce qui est singulier dans ton approche de la lumière ?
Vincent Muracciole : J’ai cette approche à la fois photographique, de designer et de transmission de la lumière. Quand je vais entreprendre un projet avec un nouvel architecte, je lui propose toujours une séance de ce que j’appelle « photosensibilisation. »C’est une mini formation d’une heure sur la lumière. En général, ils adorent !
De par ma formation de designer, je suis aussi sensible à la conception et la fabrication des produits que je prescris. Donc, c’est une combinaison des trois dimensions.
À l’avenir, que veux-tu que la lumière artificielle fasse ?
Vincent Muracciole : J’aimerais qu’elle soit aussi belle et imprévisible que la lumière naturelle. En fait, qu’il n’y ait plus d’objets et que ce soit de la lumière pure. La LED permet déjà de faire ça : le point, la ligne, la surface de lumière. Nous avons une grande chance en tant que lighting designer de pouvoir travailler aujourd’hui avec cette matière lumière. C’est un peu paradoxal pour un designer de formation, mais je pense que l’objet luminaire va disparaître, pour ne garder que son essence : la lumière.
Propos recueillis en visio par Vincent Laganier, le 21 juin 2024.
À suivre…
Vincent Muracciole : du design lumière à la photographie
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Photo en tête de l’article : Vincent Muracciole, autoportrait © Vincent Muracciole