« Paysage de lumière », un workshop international à Nantes
Qu’est-ce que la lumière apporte par rapport à un workshop en Architecture ?
Laurent Lescop : la lumière est peu enseignée chez les architectes. La lumière naturelle est un peu évoquée ici et là. La lumière artificielle n’est pas ou peu abordée. Les étudiants ont réellement découvert une nouvelle discipline, fascinante car finalement extrêmement réactive. Ils prennent un projecteur en main, l’allument et le monde se transforme déjà !
Comment les étudiants ont-ils participé à ce workshop international ?
LL : le workshop s’est déroulé en trois phases :
- la découverte de la lumière,
- l’exploration des lieux et la mise en place des concepts,
- la réalisation des projets.
Le fait de réaliser de vrais projets, de travailler sur le réel a été à la fois un facteur d’implication, mais aussi, un motif d’organisation. Les étudiants ont même inventé un protocole pour que les divergences puissent être discutées sereinement.
Quels lieux avez-vous investis en bord de Loire ?
LL : nous nous sommes installés sur l’Ile de Nantes, sous le Carrousel des Fonds Marins. Il y a une passerelle et une petite clairière que personne ne semble avoir repéré. Ce sont des lieux de passage, éclairé de façon fonctionnelle pour le premier, laissé dans l’obscurité pour le deuxième.
Quels étaient les concepts lumière développés par les étudiants ?
Les concepts étaient assez simples, puisqu’ils n’ont eu qu’une nuit pour les tester. Ils ont surtout « peint » l’espace avec des couleurs.
Pour le projet de la clairière, il y a eu un travail sur la profondeur de l’espace.
- Les premiers plans étaient rendus en couleurs chaudes, tandis que les profondeurs boisées étaient données en couleurs froides.
- Des points réfléchissants venaient animer cet espace lui conférant une vraie magie.
- Les visiteurs extérieurs en étaient immédiatement saisis et restaient longtemps à s’imprégner de cette ambiance.
La passerelle a fait l’objet d’une installation plus complexe autour d’une structure tridimensionnelle en métal.
- Un film de cellophane a été enroulé sur les poutres supérieures créant ainsi une toiture vibrante.
- Les sources lumineuses ont été placées dans les roseaux sous la passerelle ou sur les culées.
- Le résultat était assez fascinant. L’éclairage passait à travers le caillebotis métallique, le faisant flotter au-dessus des roseaux créant un vrai effet de lévitation.
- Au-dessus des têtes, la lumière se reflétait sur la cellophane suggérant la présence de l’eau par des caustiques. C’était renversant !
Comment s’est passé la mise en œuvre avec l’Éclairage Public de Nantes Métropole ?
LL : merveilleusement bien ! Une implication totale des équipes de Dany Joly et de Philippe Weisz ont permis de couper l’éclairage public qui pouvait interférer avec les projets. Ils ont aussi prêté du matériel.
Deux techniciens, Nicolas et JP sont venus installer avec les étudiants. C’était formidable ! Au-delà de leur implication technique, pour laquelle nous sommes extrêmement reconnaissants, il y avait un vrai enjeu pédagogique à l’implication de Nantes Métropole. Il était en effet important de mettre en relation de futurs concepteurs avec les services techniques d’une grande ville comme Nantes. Les méconnaissances des intentions des uns et du travail des autres risquent de créer des malentendus ou des conflits. Cette question a été parfaitement exposée et résolue lors du workshop.
Quel était le rôle du créateur lumière impliqué ?
LL : Stéphane Bazoge vient du spectacle et comprend la lumière comme un espace à sculpter. Accompagner un groupe d’étudiants est complexe. Il ne faut pas concevoir à leur place ou s’installer dans des critères personnels pour orienter les étudiants. Il faut :
- les accompagner et transformer les maladresses en situations pédagogiques.
- Ensuite, organiser le montage en donnant de bonnes règles sans bloquer l’auto-organisation des étudiants.
- enfin, expliquer comment fonctionne le matériel et prévoir les éventuels problèmes.
Comme dans toute fonction pédagogique, anticiper est le maître mot.
A la tombée de la nuit, quelles étaient les réactions des promeneurs ?
Au mois de juin, les jours sont longs… A la tombée de la nuit, nous avons pu travailler ! Nous n’avions de l’électricité qu’au démarrage de l’éclairage public.
Sur le site de la passerelle, les promeneurs étaient étonnés et surpris des jeux de couleurs et le « décollement » du sol. Certains avaient un peu peur, la plupart exprimaient fortement leur émotion.
Dans la clairière, une étrange sérénité s’emparait des visiteurs. Ils parlaient silencieusement et créaient une ambiance de calme. Quel contraste d’ailleurs avec le soir de l’installation qui avait plutôt transformé ce lieu en un salon festif intimiste !
Pour autant, la plupart des promeneurs ont cru que c’était une installation pour « Voyage à Nantes ». Les nantais sont habitués à l’art dans la rue. Ils sont familiers des installations et sont à la recherche d’émerveillement perpétuel.
Il faut noter d’ailleurs que les installations sont restées tout le week-end. Il n’y a pas eu de dégradation, comme toutes installations artistiques en extérieur entre Nantes et Saint Nazaire. Ici, les œuvres sont respectées, ce que nous ne réalisons peut-être pas assez…
Quels souvenirs gardez-vous de ce workshop « Paysage de Lumière » ?
LL : je garde de nombreux souvenirs, mais quelques-uns sont vraiment marquants.
- Il y a d’abord l’investissement des étudiants et la procession qu’ils ont organisée pour déplacer le matériel, très lourd et encombrant, de l’école vers les sites à révéler. Ils montraient leur détermination, leur investissement et la joie qu’ils mettaient à réaliser les installations.
- Une autre image, autre souvenir, celle des promeneurs qui s’arrêtaient redécouvrant des lieux devant lesquels ils avaient l’habitude de passer, s’émerveillant.
- Dernier souvenir fort, c’est l’énergie joyeuse qu’ont apporté les techniciens de Nantes Métropole. Ils ont vraiment porté les étudiants.
Comment l’ENSA Nantes ambitionne d’enseigner la lumière ?
Nous travaillons à développer cet enseignement, ouvrir des rendez-vous particuliers, comme ceux destinés à la formation professionnelle ou des workshops. Nous mettons en place une vraie politique d’ouverture vis-à-vis des autres écoles, les associations professionnelles (ACE et AFE) et bien entendu des institutions telles que Nantes Métropole, la SAMOA, le SyDEV et d’autres encore. Nous développons également des partenariats avec les fabricants et des entreprises. Nous souhaitons impliquer le plus possible les concepteurs, car ce qu’ils ont à dire aux étudiants permet à ces derniers d’ouvrir considérablement leurs champs d’investigation. Chez certains, à n’en point douter, ils déclencheront de grandes vocations.
Photographies : Barthelemy Laignez, Bernd Dahlgrün, Jakub Charkiewicz, Saskia Peters et Laurent Lescop.
Approfondir le sujet
3 écoles d’architectures
- Hafencity Universität Hambourg – HCU – 11 étudiants allemands,
- Politecknica Gdansk – GUT : 11 étudiants polonais,
- ENSA Nantes : 11 étudiants français.
3 partenaires
- Université Franco-Allemande (UFA) inscrivant cet évènement comme une démarche innovante,
- Nantes Métropole via le service Eclairage Public et Infras Télécom avec ses spécialistes,
- Île de Nantes – La Samoa participant à l’évaluation des projets,
Blog lumières ENSA Nantes
- Lumieres.nantes.archi.fr blog pédagogique sur la lumière de l’école nationale supérieure d’architecture de Nantes.
Workshop lumière en écoles d’architecture
Lieu
- Quai Fernand Crouan
- Nantes, France
Bravo !
Merci Claudia. Je t’avais envoyé un mail il y 2 semaines, tu l’as reçu ?
Bravo ! Bientôt un workshop lumière ENSA Toulouse-Nantes ? A bientôt à Nantes, Catherine