Le temps des flammes, de Christine Richier
Le temps des flammes de Christine Richier est un livre passionnant. Il y a quelques années, la profession a fait un scandale à l’Europe face au bannissement des lampes à incandescence. Jugées uniquement sous l’aspect énergivore, mais oubliant par la même la qualité d’ambiance incomparable de la lumière qu’elles procuraient, cet ouvrage est une bouffée d’oxygène. Il est abondamment illustré de peintures, dessins et gravures historiques. À lire, pour s’évader, comprendre et analyser le présent sous de nouvelles perspectives.
Christine Richier a réalisé une véritable synthèse entre la culture de la lumière, les maîtres de l’art du spectacle et la technique de l’éclairage scénique. C’est le travail remarquable d’une vingtaine d’année que concrétise ce livre. Bravo l’éclairagiste !
Organisé de manière chronologique, l’intérêt de l’ouvrage résulte dans la juxtaposition des styles. D’abord, des analyses historiques, culturelles et littéraires, sous l’angle de la lumière. Ensuite, des sources et techniques d’éclairage scénique aux mêmes époques.
Point négatif, sa mise en page avec deux tailles de police pour le corps du texte principal. C’est très désagréable pour la lecture continue. En effet, on commence par une police très lisible sur deux colonnes, type Garamond. A suivre, plusieurs doubles pages avec un encadré sur trois colonnes qui utilisent une taille de caractère presque de moitié. Et là, ce n’est pas du tout confortable pour l’œil pour le lecteur. Que de fatigue visuelle inutile au temps de l’éclairage électrique !
Résumé du livre
L’ouvrage débute dans l’antiquité avec Prométhée, le voleur de feu. Christine Richier analyse l’orientation des théâtres antiques jusqu’à l’ombre procuré par les vélums.
Au Moyen Age, l’architecture sacrée de la pensée chrétienne développe le drame liturgique dans les églises. Musique, décors, lumière et jeu d’acteur participent à la scénographie.
Avec la Renaissance arrive la perspective. Dans la peinture des maîtres, apparaisse les ombres sur les toiles. Richier présente en détail les apports intéressants de plusieurs italiens à l’éclairage scénique :
- Léonard de Vinci,
- Sebastiano Serlio,
- Leone De’Sommi,
- Angelo Ingegneri,
- Nicola Sabbattini.
Ingénieur et architecte allemand, Joseph Furttenbach, qui séjournera en Italie, va aussi contribuer à ces améliorations. Un parallèle est fait avec la situation en France pour le Baroque :
- les feux artifices,
- les illuminations nocturnes,
- les machines de l’opéra,
- le théâtre classique.
Le XXVIIIe siècle voit arriver les débats sur la nature de la lumière, la remise en cause de l’illusion scénique et les spectacles optiques. Richier rend hommage à trois figures marquantes qui vont reformer l’éclairage scénique à travers leurs traités :
- Jean Georges Noverre, chorégraphe,
- Charles Nicolas Cochin, dessinateur,
- Antoine Laurent de Lavoisier, chimiste.
De la Révolution Française à la Commune, le XIXe siècle posera, déjà, le rapport du public à l’image et au spectaculaire. 25 février 1830 à lieu la première de Hernani de Victor Hugo par la Comédie-Française à Paris. Un grand lustre au gaz dans la salle va déchaîner la critique. Pour cette nouvelle technique, deux filières sont utilisées :
- française avec la distillation du bois par Philippe Lebon,
- anglaise avec la distillation du carbone par William Murdoch et Frédérick Albert Winsor.
Dans les théâtres, on compte entre trois et cinq cent becs de gaz au milieu du siècle. En 1854, le Théâtre-Royal de Stockholm en Suède est éclairé au gaz tandis que 900 réverbères illuminent déjà les rues de la ville.
La coloration de la lumière prendra différente forme dans l’histoire du théâtre : soies, liquides où cylindres colorées. Les premières gélatines souples apparaîtront à la fin du siècle avec les lampes à incandescence. Louis Figuier pour l’exposition d’électricité de Munich en Allemagne en 1882 en fait l’usage.
De plus, l’avènement des metteurs en scène avant l’incandescence poussera plus loin l’éclairage scénique. Trois noms sont à retenir :
- Henry Irving, grand comédien anglais,
- Hugo Bähr, créateur d’effets spéciaux allemand,
- Rogelio de Egusquiza, espagnol.
Ils seront les pionniers qui inspireront plus tard Edward Gordon Craig et Adolphe Appia dans les réformes de l’éclairage scénique au XXe siècle, précise Richier.
Pour conclure, voici un petit inventaire, à la Prévert, des sources et techniques d’éclairage scénique expliquées dans le livre :
- le feu,
- la torche,
- les lampes à huile,
- les cierges,
- les chandelles de suif,
- les sources fumeuses,
- le pont lumière,
- les lustres,
- la rampe,
- les portants,
- la herse,
- la lampe d’Ami Argand,
- le réflecteur et le réverbère de Lavoisier,
- les lanternes magiques,
- le Fantascope de Robertson,
- le bec de gaz,
- l’ignifugation,
- le rideau de fer,
- le régulateur de Foucault,
- la lampe à arc élecxtrique.