À la reconquête de la nuit : la pollution lumineuse état des lieux et propositions
Sous la direction du Conseil général de l’environnement et du développement durable – CGEDD – le rapport n° 012301-01 intitulé « À la reconquête de la nuit – La pollution lumineuse : état des lieux et propositions » a été publié vendredi 18 janvier 2019 en ligne.
A la demande du Ministre d’État et Ministre de la transition énergétique et solidaire d’alors, Nicolas Hulot, en date du 27 avril 2018, ce document de 106 pages a été établi pour préparer les arrêtés du 27 décembre 2018 sur les nuisances lumineuses et les sites astronomiques. 63 personnes représentatives des associations professionnelles et des ONG ont été consultés.
Auteurs du rapport sur la pollution lumineuse
- Maryline Simoné, inspectrice générale de l’administration du développement durable, coordinatrice du rapport.
- Jean-François Landel, inspecteur de l’administration du développement durable.
- Isabelle Auricoste, chargée de mission.
Résumé
Extrait du résumé du rapport n° 012301-01 : À la reconquête de la nuit – La pollution lumineuse : état des lieux et propositions.
« La pollution lumineuse est un sujet émergent en France, les études scientifiques internationales sur l’éclairage artificiel démontrant les impacts de l’excès d’éclairage sur la biodiversité et sur la santé humaine.
Les organisations non gouvernementales se sont emparées de ce sujet dans un contexte d’évolution très rapide des technologies d’éclairage (Leds). L’éclairage public est perçu comme le principal facteur de pollution lumineuse même si l’éclairage privé est aussi impactant sur certains territoires, notamment périurbains.
La mission constate un manque de cohérence de la politique de la prévention du risque de pollution lumineuse, vue sous le seul angle des économies d’énergie liées à la rénovation de l’éclairage public, sans prise en compte des enjeux de biodiversité ou de santé humaine. Il est donc proposé de privilégier une approche pragmatique sur la base d’un plan d’action « lumière », décliné à différentes échelles et par type d’acteurs.
La mission propose que soit généralisé un inventaire géolocalisé des sources lumineuses du parc public des collectivités. Elle préconise de lancer un plan national d’éducation, d’information, de formation, de communication et d’ouvrir une réflexion sur un étiquetage environnemental de l’éclairage.
Des actions pourraient être rapidement mises en œuvre pour sensibiliser notamment commerçants et entreprises aux impacts des éclairages éblouissants et au respect de la réglementation, et soutenir les collectivités, peu enclines à une approche répressive.
Au plan juridique, la mission estime nécessaire de faire de la normalisation technique le vecteur privilégié de diffusion de la prévention de la pollution lumineuse auprès des professionnels, d’autant qu’elle est intégrée dans les cahiers des charges des marchés d’opérations de rénovation. Mais cela implique l’intervention de l’État et une articulation améliorée avec la réglementation existante. La mission suggère que les différentes réglementations sectorielles prévoient des dispositions harmonisées pour des équipements ou des installations ayant le même impact négatif en termes d’éclairage excessif. Elle propose un dispositif de sanction administrative unifié pour toutes les installations lumineuses excessives, y compris les enseignes et panneaux publicitaires lumineux.
Elle recommande de s’appuyer sur la planification qui permet mieux de prévenir les risques à différents niveaux pour y intégrer progressivement une « trame étoilée » et un « plan lumière » prescriptif et cohérent, adapté au contexte local, comprenant aussi le règlement local de publicité (RLP).
La mission identifie plusieurs actions prioritaires :
- Mettre l’accent sur le remplacement des luminaires et ampoules les plus néfastes, sur l’extinction nocturne ou la sobriété de l’éclairage des sites commerciaux et industriels, sur l’éclairage excessif des panneaux publicitaires lumineux.
- Une suppression d’ici 6 ans du stock des luminaires boules, lampes à sodium et à vapeur de mercure pourrait être prévue en y associant une action spécifique de Recylum.
- Hiérarchiser les priorités de rénovation et les actions sur les équipements les plus polluants au plan national pour y associer plus facilement une éventuelle aide financière publique.
- Créer plusieurs indicateurs de sensibilisation aux enjeux : l’évolution du nombre de points lumineux, l’avancement de la rénovation du parc d’éclairage public, le développement des trames étoilées, les évolutions des espèces témoins de la biodiversité nocturne.
La mission propose un pilotage national plus affirmé pour définir des priorités d’action publique et mettre en place un véritable suivi sur la base d’indicateurs. La création d’un conseil national « lumière », présidé par un élu, associant les principaux acteurs concernés (collectivités, professionnels, ONG), serait ici un atout ».
Sauver la nuitComment l’obscurité disparait, ce que sa disparition fait au vivant, et comment la reconquérir Editeur : Premier Parallèle |
Sommaire
Résumé
Liste des recommandations
Introduction
1. La qualification de la lumière artificielle est complexe
- Les perceptions sociologiques et culturelles de la nuit ont la vie dure
- Émise par des acteurs très divers, la lumière artificielle n’est pas vraiment régulée dans ses excès
- La définition de la pollution lumineuse évolue
- La lumière artificielle est définie par de nombreux paramètres
- Orientation des sources de lumière
- Puissance de lumière émise
- Spectre et couleur de la lumière
- Caractéristiques des lampes
- Éteindre ou doser les intensités lumineuses ?
- L’éclairage ne se limite pas aux sources lumineuses : leurs supports, leurs modalités d’installation et la gestion des réseaux sont à prendre en compte
- Un sujet transversal, avec de nombreux acteurs, sans portage politique
2. La nuit éclairée : ses impacts et enjeux
- Des impacts sur la biodiversité mais pas seulement
- Le halo lumineux nocturne
- L’environnement
- La santé humaine
- Des enjeux à mieux anticiper
- Des recherches scientifiques et techniques partielles et éparpillées
- Des difficultés d’accès aux données
- L’accélération des mutations technologiques est un levier et un facteur de risques
- Une politique à piloter et à financer sur tous les enjeux
- Justifier l’éclairage par la sécurité est une réalité plus sociologique que technique
- Vers une redéfinition de la pollution lumineuse
3. Les dispositifs actuels : des clarifications à prévoir
- La réglementation actuelle
- Le dispositif législatif et réglementaire
- La réglementation des enseignes et publicités lumineuses
- Les normes techniques
- Les limites de la réglementation
- Des réglementations sectorisées et une approche trop partielle de la pollution lumineuse
- Certaines réglementations, pour garantir la qualité de l’éclairage, privilégient
- des seuils très élevés
- Une confusion du rôle de chaque acteur
- La question des contrôles et des moyens mis en œuvre
- De belles initiatives qui se développent
4. Un plan d’actions pragmatique pour « une sobriété lumineuse »
- Un besoin de connaissance et de méthodes communes
- Des éléments de connaissance à rassembler et à mieux partager
- Une cartographie nécessaire pour envisager des actions priorisées
- Comment intéresser les particuliers et donc le grand public ?
- Par la sensibilisation, l’éducation, la formation et l’information
- Par la concertation
- Les entreprises et services, des parties prenantes incontournables (y compris publicitaires
- La normalisation, une demande des entreprises
- La réglementation : un nécessaire rapprochement des textes en vigueur
- Les sanctions : privilégier une approche d’adhésion
- Une campagne d’information des unions commerciales nationales
- Apporter des réponses adaptées aux collectivités
- Envisager une planification spatiale de la pollution lumineuse dans des outils existants
- Un partenariat avec les syndicats d’électricité à renforcer
- Stocks d’ampoules non conformes : un passif à résorber
- Des cahiers des charges type à destination des collectivités
- Des besoins financiers et d’accompagnement toujours indispensables
- Gouvernance : un pilotage national à organiser et un plan de communication à développer
- Pour que l’État soit exemplaire
- Des indicateurs simples et peu coûteux à définir
- Des concepts et une communication adaptée à différentes cibles
Liste des 10 recommandations du rapport
- Rendre systématiques des synthèses de l’état des connaissances scientifiques sur l’impact des nuisances lumineuses (DGALN : Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature, OFB : Office français de la biodiversité).
- Mettre en place une cartographie nationale des points lumineux extérieurs à partir des observations spatiales, pondérées par des données locales au sol. Y associer un inventaire géolocalisé des sources lumineuses publiques :
- Sensibiliser les publics aux enjeux de la pollution lumineuse par la formation, l’information (évolution de l’étiquetage) et par l’association des citoyens aux décisions d’investissement et de gestion.
- Utiliser et compléter la normalisation, comme un outil efficace de la prévention de la pollution lumineuse, en collaboration avec le monde économique et les ONG.
- Intégrer davantage la prévention des nuisances lumineuses dans les politiques sectorielles et leur réglementation, notamment pour les panneaux publicitaires lumineux et les sites industriels et commerciaux.
- Prévoir un dispositif unifié de sanction administrative pour toutes les installations lumineuses excessives, y compris les enseignes et panneaux publicitaires
- Inciter les collectivités à réaliser un diagnostic intégré (besoins réels, biodiversité…) préalable à tout nouveau projet de création ou de rénovation de l’éclairage public.
- Élaborer un guide des bonnes pratiques.
- Intégrer pleinement la pollution lumineuse dans les documents de planification préexistants à différents niveaux :
- Proposer le lancement par l’Ademe d’un appel à projet sur le remplacement des lampes les plus impactantes pour l’environnement, sur la base de l’inventaire (cf. recommandation 1)
- Bonifier les capacités d’investissement des collectivités locales grâce à une valorisation financière par les certificats d’économies d’énergie intégrant davantage la pollution lumineuse. Proposer un nouveau mode de financement via des obligations vertes qui aideraient les projets des collectivités locales
- Créer un Conseil National de la Lumière chargé de valider et de suivre un « plan lumière » (DGPR). A défaut, ou en complément, intégrer le sujet de la pollution lumineuse dans le 4e plan national Santé Environnement (PNSE 4) (DGPR, DGS). Définir un pilotage national avec un chef de file identifié (DGPR) accompagné d’un correspondant dédié dans chaque direction d’administration centrale (DEB, DGEC, DHUP, DGS…) et dans chaque ministère concerné (santé, sport, culture, intérieur…)
- Définir des indicateurs pour mesurer la pression lumineuse environnementale, l’évolution de la biodiversité nocturne et les progrès de l’action publique :
- Suivre l’évolution du nombre de points lumineux au plan national.
- Valoriser les indicateurs nationaux de biodiversité sur l’impact de la pollution lumineuse sur les chauves-souris.
- Créer un indicateur de renouvellement du parc public grâce au nombre d’opérations de rénovation d’éclairage public effectuées par an et prévoir un suivi de la planification intégrant la pollution lumineuse
Annexes
- Lettre de mission
- Propositions d’indicateurs faites par différents interlocuteurs rencontrés par la mission
- Approche croisée des propositions et des acteurs
- Bonnes pratiques
- La révolution des Leds
- Les impacts de la lumière artificielle sur la biodiversité
- Panorama juridique
- Illustration d’une balade nocturne
- Glossaire des sigles et acronymes
Approfondir le sujet
Lieu
- Conseil général de l’environnement et du développement durable - CGEDD
- Paris La Défense, France
Équipe du projet
Livres
Lexique de l’éclairage professionnel, de Sophie Caclin
La traduction facile français-anglais en architecture, urbanisme, lumière, éclairage et communication. Découvrez le Lexique de l’éclairage professionnel. |
Éclairage des espaces extérieurs, de Roger Couillet, 2e éd.
Projet, installation, maintenance, coût. Guide de synthèse de toutes les dispositions constructives des installations en éclairage des espaces extérieurs. |
Les LED pour l’éclairage, fonctionnement et performances, 2e éd.
2ème édition du livre technique de Laurent Massol aux éditions Dunod. Une référence pour mieux comprendre le monde des LED pour l'éclairage. |