Réalisation

Empire of Light de Sam Mendes, rien ne se passe sans lumière

Sorti dans les salles obscures françaises le 1er mars 2023, Empire of Light est un film de Sam Mendes qui déclare sa flamme au cinéma.
17 mars 2023

Empire est le nom d’un établissement fictif situé dans une petite ville côtière au sud de l’Angleterre. Typique des années 1980, ce lieu au style défraîchi devient un temple of light, sous le regard magistral de Roger Deakins. Larges plans-séquences et travellings contemplatifs se jouent alors des contre-jours pour révéler la banalité d’un quotidien bousculé par l’extérieur. Sur fond de soulèvement de Brixton pour lui et de schizophrénie latente pour elle, un amour singulier voit le jour.

Empire of light, Sam Mendes – bâtiment Dreamland Margate rebaptisé cinéma Empire dans le film © Roger Deakins

 

« Ring out, wild bells, to the wild sky,

The flying cloud, the frosty light:

The year is dying in the night;

Ring out, wild bells, and let him die. »

Alfred Lord Tennyson, In Memoriam, 1850

 

Empire of light, Sam Mendes – Micheal Ward et Olivia Colman étage Empire © Roger Deakins

La lumière comme clé de lecture

Ici, nous parlerons peu de la mise en abyme du cinéma ou de la psychologie parfois complexe des différents protagonistes. Si les performances d’Olivia Colman et de Micheal Ward doivent être soulignées, nous aborderons cette œuvre sous le prisme de la lumière. Médium essentiel à l’art cinématographique, il occupe un rôle prépondérant dans ce film. On appréciera également les tête-à-tête à l’étage du cinéma baigné d’une lumière du jour filtrée par des verres colorés. Un jardin secret qui rappelle les compositions de Edward Hopper ou de David Hockney.

Empire of light, Sam Mendes – Olivia Colman sur la jetée de Margate © Roger Deakins

De la salle obscure au front de mer

Dès les premiers plans, la lumière s’immisce dans l’espace. Personnage principal du film, le cinéma s’éveille avec les premiers rayons pâles d’un soleil d’outre-Manche, puis on décline les sources. De l’ampoule de la machine à pop-corn aux néons de la façade en passant par le gyrophare, l’artificiel contraste avec le naturel. La première phrase que l’on peut lire est une citation de Shakespeare inscrite dans le lobby de l’établissement. Avec ce Find where light in darkness lies, le ton est donné.

Empire of light, Sam Mendes – affiche du film Empire of Light © Roger Deakins

L’année se meurt dans la nuit

L’affiche du film en elle-même promet une merveille pour les luminophiles. Telles les trois vignettes d’un storyboard, le regard brillant de deux personnages se perd devant un feu d’artifice. Des lumières incandescentes que l’on retrouve également dans l’appartement d’Hilary, fragile personnage travaillant à l’Empire. Ici encore, l’écrasante lumière naturelle s’oppose à la délicatesse d’une bougie ou d’une résistance pour exprimer les sentiments.

Empire of light, Sam Mendes – Olivia Colman et Tom Brooke au guichet Empire © Roger Deakins

 

« Bring me my Bow of burning gold:

Bring me my Arrows of desire:

Bring me my Spear: O clouds unfold!

Bring me my Chariot of fire! »

William Blake, Jerusalem, 1810

 

Empire of light, Sam Mendes – staff Empire dans la salle du personnel © Roger Deakins

Confession du projectionniste

Au cours de ces deux heures de film, une scène s’offre comme un joyau pour les amoureux de la lumière. Il s’agit de celle de Norman, projectionniste passionné dont la salle de projection est bien gardée. Interprété par le touchant Toby Jones, il nous émerveille encore de la magie du cinéma. Propriétés physiques du carbone qui flirte avec l’effet phi pour un petit cours d’optique. La poésie de la lumière s’exprime dans toute sa splendeur au creux d’un projecteur. Et au cas où la lumière n’aurait pas été assez évoquée, on entend raisonner la musique de Chariots of Fire.

Empire of light, Sam Mendes – guichet Empire sur la jetée de Margate © Roger Deakins

 

« It is amazing. It’s just static frames with darkness in between. But there’s a little flaw in your optic nerve. So if I run the film at 24 frames per second, it creates an illusion of motion. An illusion of light. So you don’t see the darkness. Out there, you just see a beam of light. And nothing happens without light. »

Sam Mendes, « Empire of Light », 2022

 

Empire of light, Sam Mendes – Olivia Colman visionnant un film dans le cinéma Empire © Roger Deakins

 

 

Approfondir le sujet

 

Photo en tête de l’article : Empire of light, Sam Mendes – Toby Jones et Micheal Ward en salle de projection © Roger Deakins

Équipe artistique

Réalisateur Sam Mendes
Directeur de la photographie Roger Deakins
Chef décorateur Mark Tildesley
Costumes Alexandra Byrne
Maquillage Naomi Donne
Chef monteur Lee Smith
Monteur son Stuart Wilson
Directeur de casting Nina Gold
Superviseur musical Randall Poster
Compositeur Trent Reznor Atticus Ross
Comédiens Olivia Colman Micheal Ward Tom Brooke Tanya Moodie Hannah Onslow Crystal Clarke Toby Jones Colin Firth

Équipe technique

Production Searchlight Pictures Walt Disney Studios
Producteur Pippa Harris
Producteur exclusif Michael Lerman Julie Pastor
Coproduction Celia Duval Lola Oliyide

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Chargé de projet au sein de l'agence Concepto avec un master de l’École d’architecture de la ville et des territoires Paris-Est et un BTS Design d’Espace de l’ESAA Duperré, où il anime des ateliers. Stagiaire au sein des agences 8'18", Concepto, TVK et ON, il a contribué à l’ouvrage de l’ACE aux Éditions du Moniteur, "Places du Grand Paris" pour la SGP, et traduit un texte de Gerhard Auer intitulé "Vivre la sobriété en éclairage" avant de participer à l'édition de "Éclairage et lumière du IIIe millénaire, 2000-2050" chez Light ZOOM Lumière où il occupe un rôle de rédacteur.
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