Escale à passagers mise en lumière au fil de la Seine

Comment requalifier en lumière le port Victor à Paris et le port d’Issy-les-Moulineaux ? Deux ports situés en bord de Seine, sur deux communes et deux départements d’Île de France, dans un tissu urbain dense de 1200 mètres de long et sur 25 à 30 mètres de large. Coupé par deux ponts, l’un pour le boulevard des Maréchaux, l’autre pour le boulevard périphérique Sud-Ouest, le site est occupé par quatre entreprises industrielles. De plus, il fait face à des habitations sur la berge opposée.

Aménagements du port et enjeux

Pour lancer un réaménagement complet de ce site fluvial, Ports de Paris a profité du renouvellement des conventions de location de ses terrains en bord de Seine. Objectifs :

• Permettre un usage portuaire mixte associant activités industrielles et escales pour les passagers du fleuve.
• Pérenniser et améliorer la fonctionnalité des installations industrielles présentes sur le site.
• Valoriser les façades urbaines et fluviales du port, de jour comme de nuit.
• Mettre en place une mixité d’usage : activités industrielles et de loisirs.
• Ouvrir le site à la promenade le week-end et les jours fériés.

Ensuite, un concours d’architecture est organisé afin de répondre à ces exigences. L’équipe lauréate est pluridisciplinaire :

• paysagiste : HYL, le mandataire
• architecte : Dietmar Feichtinger Architectes
• bureaux d’études : Coplan et ISL
• concepteur lumière : Coup d’Éclat

Choix du concepteur lumière ACE

« Une préoccupation majeure donne naissance au projet lumière : l’attention constamment portée à la fonctionnalité de l’éclairage. Elle fonde l’unité du site. À l’image d’un organisme dont les parties forment un tout autonome, le projet s’adjoint une intégrité nouvelle par le traitement fonctionnel de la lumière. Mieux : ce n’est qu’à être fonctionnel que le projet lumière peut être intègre.

« Lumière intégrale » désigne alors non seulement la lumière dans son déploiement, mais aussi l’aménagement de sa part d’ombre. Deux principes lui permettent d’atteindre cette fin :

• sculpter l’ombre,
• tailler dans la lumière.

Ce double geste sublime l’éclairage fonctionnel. Au final, il met en valeur l’unité nocturne du site et non sa scénographie spectaculaire ».

Yves Adrien, Raphaël Girouard et Florian Colin, Coup d’Éclat

Lumière intégrale pour les usagers

Ménageant l’ombre et la lumière, l’éclairage fonctionnel et la scénographie du site à l’échelle du paysage, le projet visant une « lumière intégrale » s’inscrit en douceur au fil du fleuve. 

« À la hauteur de l’escale, la rive s’élargit et colonise l’eau » décrivent les concepteurs lumière de Coup d’Éclat. « L’éclairage accompagne ce mouvement et le contient. Il s’y décline sous la forme d’une variation en trois thèmes majeurs :

• variation des éclairages propices à la promenade urbaine,
• variation signalétique du balisage des pontons facilitant la lecture des berges proches et lointaines,
• variation du mobilier urbain doublé d’un éclairage spécifique.

Cette déclinaison a pour conséquence l’insertion naturelle de l’escale dans la ville, le projet lumière rend spontanée la transition entre deux types d’espaces ».

« Soustraite aux activités industrielles, la fonction diurne de l’escale est piétonnière, elle trouve un prolongement nécessaire la nuit. La lumière connaît alors une mutation dont l’origine s’enracine dans la transformation de sa fonction. Autrement dit, sur l’espace de l’escale, l’éclairage retrouve l’échelle humaine ».

« Le long du mur, les mâts grues accompagnent le projet. Ils proposent ici une lumière indirecte plus douce et délicate ».

« Le mur anti-crues se fait mur de soutènement où les ombres et lumière viennent s’adosser.

« A la rencontre des pontons, c’est la scène, le passager est acteur au milieu des éclats d’écumes de la Seine… »

Mobilier lumière sur mesure

Dessinés sur mesure pour le projet global d’aménagement, des mâts d’éclairage Technilum accompagnent l’ensemble du site.

« L’éclairage piétonnier est produit depuis des réflecteurs à facettes réglables pour un confort et une douceur bienvenus. La maîtrise du flux permet de préserver l’ombre fluviale et les projections graphiques s’insèrent dans des espaces d’ombres ».

Balisage fluvial

« Au bord du ponton, les ducs d’Albe redessinent la limite de l’embarcadère. Des projecteurs LED ambres, intégrés, se déclenchent au gré des accostages pour accompagner les croisiéristes tout en assurant une veille, phares fluviaux en somme » ».

« Sur le quai principal, des encastrés ponctuels de 20 mm de diamètre et 1 W dessinent comme une écume de Seine ».

« En rive, des encastrés autonomes ponctuent le parcours sur l’ensemble du linéaire, donnant une accroche territoriale au projet ».

Approche environnementale

“Au diapason de l’étalon naturel, les instants nocturnes sont réunis en trois régimes distincts d’exploitation fonctionnelle correspondant à trois moments : le crépuscule, la soirée et la veille ».

Crépuscule

« Le rythme hivernal des activités industrielles appelle une transition assurée par le régime crépusculaire entre éclairage privé et éclairage public. La mise en lumière du mur anti-crues rend possible cette transition.

C’est un fil dont le tracé s’affine sans rupture temporelle ou spatiale. De sa margelle à son pied, une tranche de lumière blanche s’affirme à l’annonce de la nuit”.

Dans la soirée

« En soirée, le projet lumière adopte un nouveau rythme. De continu, l’éclairage se fait discontinu. Au front du mur anti-crues, un firmament pointilliste apparaît. Au sol et aux niveaux des entrées, la surface du tapis se moire de textures projetées aux accents fluviaux. Ça et là, les façades des amodiataires côté Seine sont éclairées en contre plongée depuis le caniveau technique”.

Durant la veille

“La veille s’installe en douceur : placée sous le signe du sommeil. Le tapis du sol se drape d’une brume bleutée, tandis que la ligne des berges persiste jusqu’à l’aurore”.

La réhabilitation globale des deux ports – accès, voirie de transit et ouvrages – a été conduite par Ports de Paris en tant que maître d’ouvrage. Il fut assisté par le consultant en ingénierie Louis Berger. Les industriels du site – Lafarge, Cemex Bétons, CRH Raboni et Italcementi-Unibéton – restaient les maîtres d’ouvrage de leurs propres installations.

Approfondir le sujet

• « Lumière intégrale » de l’Atelier Coup d’éclat
• Effets de lumière bleue : Yann Kersalé
• Porche envoutant à Épinay-sur-Seine de l’agence ON
• Conception lumière à Nantes : 22 ans d’éclairage urbain
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