Media Plazza de BOA : nouveau siège social, groupe Le Monde

L’agence d’architecture norvégienne Snøhetta est basée à Oslo et New York. En association avec SRA Architectes de Paris, ils viennent de livrer le nouveau siège social du groupe Le Monde. Sur les bords de la Seine, jouxtant l’entrée de la gare Austerlitz et tête de proue du quartier Paris Rive Gauche, le bâtiment fait face à la Caisse des dépôts et consignations. Sur l’avenue Pierre Mendès-France qui va jusqu’à la bibliothèque de la BnF, l’arche architecturale luit, la nuit. Une Media Plaza conçue par le studio lumière BOA.

Parti architectural de Snøhetta

Comment regrouper les titres de référence de la presse française dans un même site ? En l’occurrence : Le Monde, Courrier international, Télérama, La Vie, Le HuffPost et L’Obs.

« Le bâtiment vise avant tout à favoriser l’ouverture, à une époque où la peur et l’incertitude poussent nos sociétés à ériger des murs et à se replier sur elles-mêmes.

En ce sens, le projet nous invite à réfléchir sur la manière dont l’architecture peut créer des espaces qui peuvent être à la fois publics et privés, extérieurs et intérieurs, transparents ou opaques.

Comme tant d’autres de nos projets, il s’agit d’un bâtiment hybride qui explore les interstices de l’architecture et qui est conçu pour être au service des usagers du bâtiment mais aussi, plus largement, au service du grand public. »

Kjetil Trædal Thorsen, architecte fondateur, directeur, Snøhetta

Siège social Le Monde en arc de cercle

En arc de cercle, la forme du bâtiment crée un mouvement concave de la façade. Son volume repose sur une arche monumentale, tel un pont habité. En porte-à-faux sur sept étages, il est maintenu en place par une superstructure porteuse en acier, sur une superficie de 23 000 m².

D’après les architectes de Snøhetta, « trois parties distinctes structurent la masse du bâtiment :

• le couronnement révèle la surface oblique du toit recouvert de panneaux solaires ;
• le corps central développe un linéaire de façade permettant de privilégier les vues ;
• le socle offre un large espace central, ouvert au public. »

Façade de verre pixélisés, Le Monde en transparence

Sur 80 mètres de long et 37 mètres de haut, la façade du Groupe Le Monde se joue de la transparence de l’information, version architecturale. Tel le gris du texte d’un journal mis en page, c’est une fenêtre ouverte sur la ville. Elle scintille de jour sous le ciel parisien et rayonne la nuit jusqu’au bouclage des titres. Une référence de plus aux lettres imprimées des magazines et leurs modes de production nocturne.

Pour Frank Denis Foray, architecte et directeur de projet chez Snøhetta pour le siège du groupe Le Monde, chaque élément de verre représente un pixel distinct, comme un écran d’ordinateur. Ils sont classés en plusieurs échelles de réflexion et de diffusion de la matière :

• 4 niveaux d’opacité, de « transparent » à « totalement opaque »,
• 4 types de texture, de dimensions et placements variés,
• 25 % de verres réfléchissants,
• 3 cm entre les verres, se juxtaposant et se superposant pour éviter l’intrusion d’oiseaux, mais interstice parfait pour bâtir un nid.

Pour SRA Architectes, l’implantation du verre privilégie la qualité d’usage de l’architecture :

• assurer une diffusion maximale de la lumière du jour à l’intérieur du bâtiment pour le confort visuel et l’ambiance lumineuse,
• cadrer les vues sur Paris, les quais de Seine d’un côté, l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière et le 13e arrondissement de l’autre.

Au total, la façade de Snøhetta est composée de plus de 20 000 éléments de verre pixélisés sur les 10 000 m2 à la verticale. Ils sont disposés selon un schéma préétabli de 772 configurations différentes possibles.

Media Plazza de BOA sur l’arche du Monde

Comme le fac-similé de la grotte de Lascaux, l’arche sous le siège du Monde est réalisée en béton projeté, de manière totalement artisanale. Les entreprises Glauser et le spécialiste français de cette technique, l’Atelier Artistique Béton – AAB, se sont alors associées. Son béton est un peu jaune pour se rapprocher de la couleur de la pierre de Paris. La dernière couche de finition ayant été travaillée entièrement à la main et à la brosse.

Au-dessus de cette place publique, une œuvre lumière a été conçue dès le concours d’architecture dans la voûte. L’atelier coopératif SNAIK de Yann Kersalé, devenu le studio lumière BOA, en est à l’initiative.

« La Media Plazza est une installation artistique composée de points lumineux incrustés en sous-face de la voûte en béton. L’idée est que le groupe Le Monde nous renseigne sur l’état de la planète. »

Jean-Marie Priol, directeur artistique, BOA

Contenu lumineux de la Media Plazza

Côté contenu, à la recherche « de quelque chose d’un peu magmatique, nous sommes assez vite entrés dans la narration, en low résolution, qui s’inscrive dans Paris la nuit. » explique le directeur artistique.

« Nous avons une animation quotidienne en boucle avec un montage d’effets de ciel. Elle combine du blanc chaud et du blanc froid, selon les couleurs de la nuit de la ville de Paris.

Une programmation événementielle est conçue en monochrome bleu. C’est la couleur du groupe Le Monde.

À terme, un dispositif interactif devrait être fonction de l’activité du Monde. Pour palpiter en direct avec ce qui se passe à l’intérieur car, c’est la peau du bâtiment. »

Jean-Marie Priol, directeur artistique, BOA

L’ensemble ce travail s’est fait avec les logiciels Adobe Photoshop et After Effects.

Implantation lumière de la Media Plazza

L’écran lumineux du groupe Le Monde est constitué de points de LEDs implantés de manière artistique. De plus, les inter-distances ne sont pas homogène. Elle varie entre 60 centimètres et plus de deux mètres, selon les endroits. L’implantation précise a été conçue dans une la maquette 3D venant de Revit en BIM.

Les perforations de la peau en béton de l’arche du Monde sont très techniques.

« Il y aussi une contrainte de maintenance qui est énorme. Il nous fallait trouver un système pour changer chaque point lumineux, comme une ampoule, avec un accès uniquement par l’extérieur.

En fait, nous avons inventé un système avec Snøhetta et SRA Architectes ».

Fabienne Maman, directrice technique, BOA

En bref, l’implantation des points lumineux est donc variable :

• pas de point sous 2,5 mètres de hauteur,
• à partir de 2,5 m, l’implantation des points de faible densité est aléatoire,
• dans l’arche, les points lumineux sont positionnés à haute densité.

Cette haute densité a été rendue possible par le calepinage des joints de dilatation du béton projeté.

Technique d’éclairage de la Media Plazza

Le choix du luminaire assez gros s’est porté sur un Lumendome Nano de chez Lumenpulse. Les points lumineux LED 2W diffusant de 72 mm de diamètre sont en RGB, mais cela n’a pas été un critère pour le directeur artistique. « La qualité chromatique du matériel d’éclairage était pour nous essentielle » explique Jean-Marie Priol.

Le pilotage vidéo du groupe Le Monde s’effectue par un contrôleur Pharos. Il gère l’installation avec un switch PoE jusqu’au Splitter DMX/RDM qui pilote chaque luminaire. Ces derniers sont alimentés par un câble secteur en 230V et un câble réseau en DMX.

Chaque séquence est déclenchée automatiquement par un ordinateur selon la programmation. Le gestionnaire du bâtiment peut prendre la main en appuyant sur des boutons poussoirs pour les séquences événementielles.

Au total, l’installation artistique compte 1312 points lumineux, commandés point par point dans le béton. Soit 3936 adresses DMX et 8 univers DMX au niveau câblage.

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