Moving Target : Frédéric Flamand et Diller+Scofidio
Durant un voyage de six mois au Brésil, Frédéric Flamand découvre le processus créatif de l’architecte Lina Bo Bardi. « Elle apportait des objets et commençait à rêver. » raconte le chorégraphe.
De là, naît l’idée de travailler avec des architectes. La rencontre entre Frédéric Flamand, Elisabeth Diller et Ricardo Scofidio était évidente. Le chorégraphe se rappelle ses lectures des livres des architectes :
« Pour nous, l’architecture, c’est tout ce qui se passe entre la peau d’une personne et la peau d’une autre personne. »
Diller Scofidio + Renfro, architectes
Partant des Cahiers non censurés du chorégraphe Vaslav Nijinski sur la création et ses méandres, Flamand va travailler sur la schizophrénie pour ce spectacle.
La scénographie
L’architecture créée par Diller Scofidio + Renfro – agence basée à New-York – est une interface. C’est un miroir semi-transparent, de la largeur du plateau, qui bascule à 45° au-dessus de la scène.
Il crée un trouble visuel très intéressant pour le spectateur. Où regarder les danseurs ? Sur le plateau ou sur le reflet dans le miroir ? A deux endroits opposés de l’espace scénique, simultanément, quelles actions suivre ?
En toute conscience, le spectateur expérience la folie du regard. Le nécessaire choix qui s’impose à chacun.
« Le miroir fait éclater la perception de la boîte scénique. On a l’impression qu’un danseur vole. Il pose aussi la question du statut du corps pour les danseurs. »
Frédéric Flamand, chorégraphe
La danse
Le spectacle présenté à la Maison de la Danse de Lyon est calé au millimètre, architecture oblige. C’est une performance artistique et technique à la fois. Il y a une beauté géométrique dans la composition de la danse. Les barres sont comme des « échelles graphiques » d’un plan, sur tirage papier d’antan.
Peinte en noir et blanc, la barre de fond de scène rappelle celle d’une salle de danse, version plus architecturale. Un moment intéressant est le solo d’un danseur qui joue avec un texte défilant sur le sol. Le texte est d’abord projeté à l’horizontale dans le miroir. Puis, il se réfléchit sur scène. Entre virtuel et son image, le jeu visuel est impressionnant.
La lumière
Dans deux séquences magiques du spectacle, le danseur contemporain jouent avec ces barres blanches et noires, comme en apesanteur. Elles deviennent lumineuses marquant ainsi leurs matérialités.
« La lumière, c’est ce qui fait vivre la scène et lui donne sa virtualité. Corps réel, virtuel, reflet, transparence et opacité. Elle sculpte l’espace. Fait apparaître et disparaître. »
Frédéric Flamand, chorégraphe
Côté technique, un cyclorama blanc en fond de scène est éclairé uniformément en vert pomme au début ou en blanc moyen selon le moment du spectacle. Il est recouvert d’un tapis noir pour les scènes où le miroir est incliné afin d’augmenter le contraste avec le fond.
Deux faisceaux diagonaux blanc froid HMI créent des lumières frisantes sur le plateau, de la face-cour au lointain-jardin, et vice et versa. Elles projettent un rectangle blanc sur le fond dans lequel l’ombre du danseur fait partie de l’action, dans l’axe de tir du projecteur.
Classique de la danse, il y a une batterie de projeteurs halogène en latéraux, souvent gélatinés en blanc froid, pour souligner les mouvements.
Autres techniques, plus avant-gardiste pour la scène :
- des pointeurs laser rouge portés par les danseurs,
- un panneau à message variable en LED rouge,
- des projections vidéo de cinq spots de publicité sur le corps, revus et corrigés sur un mode humoristique,
- des projections d’images vidéo : parties de corps, de textes en capitale,
- une projection d’un pointeur cible : Moving Target.
Frédéric Flamand conclut : « Le spectacle vivant est aussi un spectacle médias. »
Approfondir le sujet
- Pièces courtes de Philippe Decouflé, comme en lévitation
- De « Corps est graphique » à « Pixel », l’art de Mourad Merzouki
- Le mouvement de l’air, de Adrien M / Claire B
Quelques vidéos utiles
- La minute du spectateur sur Frédéric Flamand de Dominique Hervieu, Maison de la Danse de Lyon
- Moving Target, Frédéric Flamand, Elizabeth Diller, Ricardo Scofidio sur Numéridanse.tv
- Regardez la séquence des barres lumineuses dans Moving Target sur Numéridanse.tv en réglant vous-même la lecture de la vidéo à 18’20’’ à 24’30’’
- Regardez la séquence du danseur avec le texte projeté et le ballet de pointeurs rouge dans Moving Target sur Numéridanse.tv en réglant vous-même la lecture de la vidéo à 25’38’’ à 28’00’’
Lieu
- Maison de la Danse
- Lyon, France
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