Peinture lumière et projections d’images par Artslide
Laurent Langlois est un réalisateur plasticien passionné. Depuis une douzaine d’année, il travaille, à partir d’images photographiques projetées, sur la réalisation et la scénographie d’événements spécifiques. Pour l’appel d’offre du Festival Lyon Lumières 2000, l’artiste proposait une réflexion sur l’Hôtel de Ville de Lyon : « Le pinceau du peintre, prolongement de la main et du geste, se transforme en ‘pinceau lumière’ sur la façade, » mais, arrivé second, ce projet n’aboutit pas. « Peinture lumière » attendra l’an prochain.
Peinture lumière, théâtre des Célestins, 2001
En 2001, la ville de Lyon lance sa consultation pour le 3e Festival. En un an, le projet a mûri. Laurent Langlois l’imagine plus adapté au théâtre des Célestins, en compétition. Il développe une séquence en trois parties :
- Acte 1 : « Par des traces de peinture blanche successives la façade se révèle, son image se construit, un chapiteau apparaît, une colonne, puis l’ensemble de l’architecture. »
- Acte 2 : « La peinture coule par gravité sur la toile disposée au sol. Le déplacement du pot percé la fait jaillir directement. Ce ‘dripping lumière’ reconstruit la façade par taches blanches successives. »
- Acte 3 : « Un acte manqué. La chute du pot provoque des coulées verticales de lumière blanche du haut de la façade jusque sur les marches. »
« Dans chaque acte, quand l’image entière de la façade est révélée par la lumière blanche, les ouvertures du théâtre deviennent rouges, comme si le fait de lui avoir rendu son image frontale le faisait exister de nouveau en trois dimensions. Au fur et à mesure que l’image est refermée par la peinture noire le rouge intérieur disparaît progressivement, le théâtre s’endort… puis un nouveau cycle commence… »
Images vidéo grand format et peinture blanche
Sur 14 projets présentés, le producteur Abax et Laurent Langlois, Artslide, sont désignés lauréats. La réponse technique au concept est d’autant plus originale qu’innovante. Face au film de 70 mm en boucle, c’est la vidéo grand format qui est retenue dans le projet définitif remis fin septembre à la Ville. Les étapes de la réalisation suivent celles d’un tournage classique autour d’une équipe de 3 personnes : un cadreur monteur, un ingénieur du son et le plasticien.
D’abord, une photographie-référence, avec la focale du futur vidéoprojecteur et de son emplacement, est effectuée. Après un tournage test et essais des Panasonic loués chez Top Audiovisuel, un story-board définitif avec un découpage minuté des séquences est effectué.
Ensuite, le tournage en studio chez Abax est soigneusement préparé. Les coups de pinceau et de spatule sont réalisés selon le principe du Théâtre Noir. Face caméra, un panneau de verre transparent de 1,20 m de base est placé verticalement.
Deux découpes latérales de 2 kW l’éclairent, révélant discrètement quelques repères de la position des arcades et colonnes du théâtre. La prise de vue s’effectue pendant que l’artiste peint la vitre : soit 7 versions avec « choix au montage ». Le dripping, à la manière de Pollock, est filmé au banc titre, de façon verticale à 4 m de haut. Le son est enregistré en direct par deux micros studio.
A partir des rushs, le montage vidéo s’effectue sur le logiciel Média 100 et donne 2 séquences de 10 min enregistrées en vidéo Beta SP (la deuxième séquence étant une variante où l’effet du pinceau devient spatule). Le montage s’achève par la bande son mixée par Yvan Lattay.
A part le dripping, les bruits de pinceau et de spatule sont post-produits par le plasticien en visualisant la vidéo sur un petit moniteur. Pour le pinceau a été utilisé « un pinceau sec sur une toile » et « une équerre en plastique sur un parquet » pour la spatule.
Ensuite, 600 points de montage son sur le logiciel Protolls ont été nécessaires pour les synchroniser parfaitement avec l’image. Un travail qui accentue le trompe l’œil, rend la lumière sonore, faisant de cette réalisation une réussite esthétique et technique qui a reçu le prix du patrimoine lyonnais du Trophée des Lumières 2001.
Domaine public en scène pour la Fête des Lumières 2012
« La prise en compte de l’espace public dans lequel on travaille fait partie du cahier des charges du festival » explique Laurent Langlois. Ainsi, les projecteurs étanches des fontaines de la place, l’ensemble de l’éclairage public au vapeur de mercure et les spots halogène au rez-de-chaussée des commerces alentours ont été gélatinés de rouge vif, chacun négocié individuellement avec différents interlocuteurs. De même, les deux bandes d’arbres latérales sont passées du blanc froid au vert primaire pour réduire toute lumière parasite.
Afin de ne pas masquer la façade, la cabine de projection a été placée en périphérie et dans l’axe de la place. Telle une arche monumentale réalisée en structure échafaudage et tôles ondulées, un passage inférieur piéton fut conservé tandis que l’ensemble des éléments de pilotage de l’installation et les deux vidéoprojecteurs Panasonic en dual – superposés l’un sur l’autre – étaient situés sur un plateau à 3 m de hauteur. En limite de réglage du zoom, les images vidéo ont été réalisées un peu plus petites que nécessaire pour le réglage et le montage final copié sur un disque dur Doremi supprimant le problème de mise en boucle sur cassette.
L’installation vidéo, le son et la lumière intérieure rouge du théâtre ont été pilotés, via un ordinateur Mac, par le logiciel Trax. Enfin, quatre enceintes sur pieds furent installées aux balcons du premier étage du théâtre pour retransmettre la bande son passant sur deux amplis, un rack et une console.
Extrait de l’article de Vincent Laganier, « Projection d’images géantes, l’actualité et les réalisations, 3ème Festival Lyon Lumières », côté jardin, Guillaume Atger et Andrew Doig à La Duchère, côté cour, Laurent Langlois sur le Théâtre des Célestins, pages 34-40 et couverture de Actualité de la Scénographie, n°121, février 2002, Editions AS, Paris et Nantes.
Lumières archipicturales, Théâtre des Célestins, 2012
Pour la Fête des lumières 2012, la façade du théâtre devient une toile sur laquelle naissent des tableaux éphémères, s’enchaînant tel un « marabout et bout de ficelle » pictural. Les gestes concentrés du peintre donnent progressivement forme à la matière et aux couleurs, posant et étalant la peinture, frottant la brosse contre la toile, raclant sa spatule… lorsque soudain, le spectateur est entraîné dans une nouvelle dimension : mais qui sont ces lilliputiens qui s’attaquent de toutes parts au théâtre ?
Quelles évolutions avez-vous apporté à votre travail ?
Laurent Langlois : en 2001, mon intervention s’attachait à dévoiler la façade tour à tour à coups de pinceau blanc, avec une spatule, par projection de peinture, en renversant un pot de peinture sur l’édifice… Ces séquences se déroulaient en noir et blanc.
Cette année, grâce à la qualité de définition et à la puissance lumineuse dont nous disposons désormais dans la projection vidéo, je vais pouvoir utiliser les couleurs et surtout restituer toute la matière de la peinture, ses pigments, sa texture.
De même, la très haute définition de l’image permet aussi d’opérer de vrais changements d’échelle, en passant du plan de la main du peintre à une vision élargie à l’ensemble de la façade.
Pourquoi ce choix de travailler sur l’univers du peintre ?
Laurent Langlois : diplômé des Beaux-Arts, je suis issu de l’univers de la peinture. J’apprécie de jouer sur les différents modes de représentation entre photo et peinture, vidéo et peinture et la perception qu’en a le spectateur.
Approfondir le sujet
Lieu
- Célestins, Théâtre de Lyon
- Lyon, France
super!
Bonjour,
Vous est il possible de m’indiquer un logiciel permettant modestement de réaliser ces superbes effets. Notre projet concerne l’animation d’une association à l’occasion de ses 50 ans.
Cordialement
Marc BAYON
@Marc Pour cette question, le plus simple est de contacter directement le réalisateur plasticien Laurent Langlois. Voici son site : https://artslide.fr/