Projet EVA – Nous sommes les fils et les filles de l’électricité
Les 25 et 26 avril 2016, la salle de spectacle nantaise Stéréolux a été l’hôtesse d’une performance particulière, Nous sommes les fils et les filles de l’électricité, réalisée par le collectif d’artistes numériques québécois Projet EVA, composé du duo Simon Laroche et Etienne Garnier, tout droit arrivés du Québec pour nous présenter leur réalisation.
« Merci d’arriver à l’heure, la performance nécessite un temps de préparation et d’habillage de 30 minutes »
La note sur le ticket est inhabituelle. Un temps de préparation et d’habillage ? Allons-nous être acteurs de la performance ?
Une fois sur place, nous sommes rapidement emmenés dans les coulisses de Stéréolux, découvrant pour la première fois l’envers du décor des salles Micro et Maxi. L’ambiance est intime, nous sommes seize, baignés dans une lumière incandescente filtrée par une fumée de scène.
Nous sommes les fils et les filles de l’électricité
Arrive l’heure de notre première contribution. Je ne vous dévoile rien, vous irez vous-même faire l’expérience. A son issue, un numéro nous est attribué, et l’on nous habille d’une cape, semblant destinée à effacer nos appartenances sociales par la dissimulation de nos habits.
C’est alors l’heure de l’appel. Deux par deux, nous sommes installés face à face sur une simple chaise, dans une obscurité seulement entrecoupée d’une faible douche de lumière blanche ; impossible de distinguer ce qui compose le décor dans lequel nous sommes.
Un casque à l’allure particulière nous attend. Sorte d’armature mécanique mêlant écouteurs immersifs et pico-projecteur dirigé vers le visage. Assis en deux rangées symétriques de huit participants, le casque solidement arrimé sur le crâne, nous ressemblons à une succession de Neil Harbisson !
Dubitatifs, expectatifs voire craintifs, nous nous laissons surprendre par un son qui envahit nos oreilles, et nous coupe du monde. L’atmosphère musicale nous enveloppe, les sonorités sont indescriptibles ; riches, entraînantes et troublantes, elles nous immergent dans de nombreux univers tout au long des trente minutes d’action.
Et s’il n’y avait que la musique !
Le pico-projecteur, focalisé sur le visage de chaque être casqué, mappe savamment les figures, et se saisit des reliefs propres à chacun. Des motifs en perpétuelle mouvance transforment les physionomies, perturbent les perceptions, intriguent sur la capacité d’une simple image animée à transformer si radicalement la face d’un homme.
La musique continue, et se ponctue de quelques bribes insidieusement prononcées, qu’il nous est parfois demandé de répéter. Ces paroles reprennent des éléments de notre personnalité, et lorsque nous élevons la voix à la demande du casque, c’est pour mieux dévoiler notre for intérieur aux autres participants, déroutant.
Les motifs défilent sans discontinuer, et se succèdent sans se ressembler. Les mouvements lents laissent place à des séries psychédéliques, et nous comprenons pourquoi la performance est déconseillée à ceux sujets aux crises de toutes sortes.
Le spectacle est inédit. Les deux artistes réalisent une prouesse numérique et sociale, et se servent des médias dans lesquels nous nous isolons habituellement pour, cette fois, mettre en avant nos personnalités, sous tous ses aspects. Si vous pensez être à l’abri de toute intrusion avec un casque sur les oreilles, allez donc tenter l’expérience du projet EVA, et vous vous apercevrez que ce qui sort des écouteurs ne va pas vous isoler du monde !
Au fil de ses interventions, cette voix, douce mais ferme forme de diktat électronique, vous dira parfois de fermer les yeux, de vous laisser envahir par la musique, et de ne surtout pas tricher.
Un conseil, trichez !
Approfondir le sujet
Lieu
- Stereolux
- Nantes, France