Une seconde d’éternité, fantômes, ombres et reflets
« Une seconde d’éternité » dessine un parcours inspiré par la question et l’expérience du temps, à travers un ensemble d’œuvres de la Collection Pinault. L’exposition est répartie sur tous les espaces de la Bourse de Commerce :
- de l’exposition « Felix Gonzalez-Torres – Roni Horn »,
- à Opéra (QM.15) de Dominique Gonzalez-Foerster,
- jusqu’à l’ensemble du musée.
Elle rassemble les oeuvres de vingt artistes.
Une seconde d’éternité, le temps en question dans l’art
Le récit composé par les oeuvres explore la polysémie du temps présent, tour à tour suspendu, fugitif, habité de présences spectrales, traversé par le thème de l’absence et de l’incarnation. Ce cycle emprunte son titre à l’oeuvre de l’artiste belge Marcel Broodthaers « Une seconde d’éternité » (d’après une idée de Charles Baudelaire) conçue en 1971. Un film qui fait apparaître, pour un court instant, la présence de l’artiste par la simple figuration de sa signature.
Cette oeuvre donne le ton d’une exposition de la Bourse de Commerce où l’intensité de la présence des corps et des images se mesure à l’aune de leur fugacité. Il s’agit, comme dans les mots de Charles Baudelaire, de saisir « dans une seconde l’infini de la jouissance » et de la contemplation.
Fantômes, ombres et reflets
« Une seconde d’éternité » est peuplée d’ombres et de fantômes. La réflexion du spectateur apparaît dans les oeuvres de Larry Bell, Rudolf Stingel, Liz Deschenes ou Nina Canell.
La façon dont plusieurs oeuvres jouent avec le reflet ou la participation directe des spectateurs peut être considérée comme une confrontation réflexive à la question de l’identité, associée à la fluidité, la mobilité.
Untitled, 2001 – Installation de Rudolf Stingel
Ouverte et malléable, l’oeuvre de Rudolf Stingel ne procède à aucune mise à distance entre elle et son public, qui est invité à intervenir directement sur sa surface.
Les traces qui en résultent rappellent les graffitis de l’espace urbain et forment un palimpseste de signes hétéroclites marquant à la fois la présence et l’absence des corps dont elles sont les empreintes.
À la fois situation et image, l’installation de Rudolf Stingel s’inscrit en faux de l’idéal moderniste, qui conçoit l’art en tant que sphère autonome. En unifiant l’action et la représentation, elle fait oeuvre de la relation intrinsèque entre la création et la vie qui l’entoure.
Cette oeuvre a été présentée pour la première fois lors de l’exposition « Where Are We Going? » (2006) au Palazzo Grassi à Venise, puis pour « Une seconde d’éternité » (2022) à la Bourse de Commerce, à Paris.
Les parois de la pièce sont recouvertes par des murs en Celotex et d’un l’isolant Tuff-R. Ce dernier possède deux faces réfléchissantes dans un panneau sandwich : l’une est une feuille continue de papier d’aluminium ; l’autre est un parement tri-laminé durable composé de papier d’aluminium, de kraft et d’un film de polyester métallisé.
En fait, Rudolf Stingel ne précise laquelle des deux faces il utilise dans son installation Untitled, 2001.
Visiteurs de l’exposition Une seconde d’éternité, partager votre point de vue de l’éclairage de cette installation en bas de cet article dans un commentaire.
Standing Walls II, 1968-2016 – installation de Larry Bell
Les perceptions visuels et physiques de Standing Walls II (1968-2016) de Larry Bell offrent une expérience immersive. Brisant délibérément la structure du cube, l’artiste crée une ambiguïté spatiale en disposant en zigzag les treize parois de verre clair et de verre gris.
Il combine à la fois une vision directe et une vision périphérique, privilégiant une « illusion atmosphérique » tridimensionnelle, renforcée par les subtiles gradations chromatiques.
Face aux panneaux semi-réfléchissants, le reflet du spectateur apparaît tout en disparaissant comme si son image était captée et absorbée dans la matité des surfaces, le transportant vers un monde fantomatique.
Standing Walls II actualise la puissance du leurre, du simulacre, rendant difficile la distinction entre le réel et le virtuel, tant les reflets et les espaces environnants fusionnent, tant les regards de soi et des autres se superposent.
L’installation se compose de six panneaux de verre gris trempé et sept panneaux de verre transparent. Chaque mur de verre fait 243,8 × 182,8 × 1,27 cm.
Ainsi les reflets fragiles de ces sculptures monumentales montrent que l’humain n’est que de passage : « Toute l’oeuvre de Larry Bell, écrit Marie de Brugerolles, est traversée par la question de l’apparition et de la disparition de la figure humaine. Elle est le lien qui anime les surfaces, irradie les ombres et perturbe le spectateur ». Face aux étranges miroirs de Larry Bell, des silhouettes se donnent à voir, puis passent comme des spectres.
Approfondir le sujet
- Marseille, Entre-temps, l’éloge de la lenteur
- Artistes contemporains de la lumière et Nicolas Schöffer
- Pinault Collection Paris, Tadao Ando et éclairage Ingélux
Photo en tête de l’article : Untitled, de Rudolf Stingel, 2001 © Rudolf Stingel. Pinault Collection. Vue exposition, Antenne de Trente, Palazzo delle Albere, 2001. Courtesy de artiste. Photo Santi Caleca
Lieu
- Bourse de Commerce Pinault Collection
- Paris, France
Livres
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