Le Point Lumineux, agence de conception lumière à Besançon
Quelle est la mission de ton agence, Le Point Lumineux ?
Thierry Walger : la mission de mon agence est la mise en lumière intérieure et extérieure, principalement hors de France. Je fais 80 % de mon chiffre d’affaires à l’étranger.
Quel est le plus petit projet d’éclairage de l’agence ?
Thierry Walger : nous avons réalisé un petit projet à l’entrée de la ville d’Ornans, 4 200 habitants, Franche-Comté. Sur un rond-point, il y a une œuvre du sculpteur franc-comtois Pascal Coupot, réalisée en 2004. La truite de Pascal Coupot sort de l’eau pour « moucher » au-dessus d’une fontaine avec des jets d’eau.
Il y a une dizaine d’années, nous l’avons mise en lumière avec des variations allant du bleu au vert, comme l’écoulement de la rivière de la Loue juste à côté. À certains moments, il y a un blanc froid assez violent, comme si la truite sortait de l’eau pour « moucher ». Quand je passe le soir, je suis content du résultat. Le matériel d’éclairage installé est de qualité, et d’origine française. L’installation fonctionne bien.
Comment le plan lumière de la ville d’Ornans a-t-il gagné un prix ?
Thierry Walger : c’est la patrie du peintre Gustave Courbet. Ça a commencé par le plan lumière de la ville et ça s’est terminé par le parcours de la rivière de la vieille ville.
Sous les maisons en encorbellement, un éclairage dynamique bleu et blanc change imperceptiblement. C’est-à-dire qu’il ne se voit pas au premier regard. Encore une fois, la lueur symbolise l’écoulement de l’eau avec une mise en lumière des passerelles, des petites places et de la falaise.
L’ensemble de l’éclairage architectural est à l’échelle de la ville. Le Point Lumineux et la ville d’Ornans ont gagné le 1er prix AFE 2016 pour cette mise en lumière des bords de la Loue.
Quel est ton plus grand projet d’éclairage à l’étranger ?
Thierry Walger : un autre projet que j’aime bien, c’est le palais présidentiel à Abu Dhabi. Il fait 75 000 m2 au sol sur deux niveaux. Nous avons fait la mise en lumière intérieure uniquement. Il y a des pièces qui mesurent 100 mètres de côté, sans piliers intermédiaires, et 70 mètres de haut. Il a donc fallu réfléchir.
Je m’étais déplacé sur place une fois l’installation terminée, j’avais les yeux quand même pleins de larmes. Nous avons passé des nuits à travailler là-dessus. Si j’osais, je dirais que « ça a de la gueule ».
Quelle est la taille de l’agence aujourd’hui ?
Thierry Walger : en quelques chiffres et éléments synthétiques, Le Point Lumineux, c’est :
- siège social : Besançon, France,
- création : janvier 2007,
- effectif : deux salariés,
- réalisations lumière : une centaine,
- pays des projets réalisés : France, Maroc, Arabie Saoudite, Koweït, Abu Dhabi, Russie…
Comment prends-tu en compte ton travail sur la lumière ?
Thierry Walger : c’est un travail, mais c’est surtout une passion. Quand je me lève le matin, j’arrive à l’agence, j’ai les yeux qui pétillent.
C’est un boulot qui est passionnant, dans la mesure où :
- en début de journée, je travaille sur un projet en France,
- deux heures plus tard, je suis sur un projet au Maroc,
- une heure après, je suis en Arabie puis en Éthiopie.
On a même eu des projets en Russie…
Quand as-tu repris tes déplacements après ton accident de voiture au Maroc ?
Thierry Walger : dès que j’ai pu. Je suis repassé à l’endroit où j’ai eu mon accident au Maroc pour tourner la page. Maintenant, je me déplace tout seul à l’étranger. Pour autant, je ne rigole pas, car je me déplace encore avec une canne.
De plus, il y a des pays où il y a des trottoirs, d’autres où il n’y a rien du tout. Je n’accepte pas l’aide de la personne qui me tend sa main, car je souhaite me débrouiller tout seul pour me déplacer. J’ai beaucoup progressé.
On a démarré un énorme concours en Éthiopie pour l’Unesco. J’y étais tout seul début mai. Bref, je vais de l’avant.
Pourquoi et comment parler de la lumière ?
Thierry Walger : ce n’est pas si évident. Si l’on parle de lumière avec quelqu’un que l’on croise dans la rue, personne ne sait la définir. Éventuellement, une personne sur cent peut avoir quelques notions.
Alors arriver dans un monde professionnel pour expliquer que votre projet de construction de la lumière devrait être étudié pour telle et telle raison en intérieur :
- quelles sont les missions,
- que faites-vous dans tel local, dans tel autre,
- quelle est l’architecture,
- quel est l’aménagement… c’est complexe.
Peu d’architectes en France le comprennent et l’acceptent.
À l’étranger, ils sont beaucoup plus avancés et principalement dans les pays arabes. Ils ont compris l’intérêt de la lumière ; c’est aussi une mentalité différente. Il faut comprendre cette culture pour l’accepter.
C’est plus facile pour moi, car ma grand-mère était algérienne et elle est enterrée au Maroc. Donc les pays arabes, ça me parle.
Propos recueillis par Vincent Laganier le 8 juin 2022 à Bourg-en-Bresse.
À suivre…
Culture de la lumière dans les pays arabes
Approfondir le sujet
- Thierry Walger : de l’électricité à la conception lumière
- Au pays de Courbet, lumières de la Loue à Ornans
- Concours Lumières : jardins de la fontaine, Nîmes – 2ème prix
- Métiers de la conception lumière et de l’art en éclairage
Photo en tête de l’article : au pays de Courbet, lumières de la Loue, Ornans, éclairage public, Franche-Comté, France – Concepteur lumière Le Point Lumineux © LEC – Photo : Nicolas Waltefaugle
Lieu
- Le Point Lumineux
- Besançon, France
Livres
Éclairage et lumière du IIIe millénaire, 2000-2050, un livre collector
Le phénomène éclairage a vécu une mutation. Ville, architecture, conception lumière, pollution lumineuse... Qu'en sera-t-il demain ? |
Bonjour,
Je crois que je comprend la démarche artistique, mais je pensais que l’éclairage direct des cours d’eau était maintenant interdit par l’arrêté du 27/12/2018 de manière rétroactive. Le législateur a pris en compte la protection des écosystèmes aquatiques, très sensibles, notamment au bleu. Il y a des exceptions qui m’auraient échappées ? je reste modeste par rapport à la complexité de cet arrêté :-;
Merci
Bonjour,
Votre interprétation est tout à fait OK !
Merci
En revanche il ne me semble pas qu’il y ai pas d’obligation de mise à niveau (retro activé de l’arrété).
En revanche , relampage, réparations impliqueraient alors l’obligation de respect de l’arrêté.
Bonjour.
La rivière n’est surtout pas éclairée directement, ce sont les murs perrés qui le sont et de manière mesurée. Il faut aussi considérer que la ville compte moins de 4200 habitants, nous ne sommes donc pas dans une grande ville et les habitudes sont bien différentes.
Cette installation a été réalisée avant le décret du 27.12.2018 et elle a d’ailleurs gagné un prix.
Les niveaux d’éclairement sont assez faibles et ils varient très doucement pour symboliser l’écoulement de l’eau et l’ensemble de cette mise en lumière s’éteint à 24h00.
Cette mise en lumière est appréciée par les habitants de la ville et par les visiteurs.
Cordialement.